Itinéraire en Dracénie, parcours initiatique en haute Provence.

Oliveraies à Figanières

Oliveraies à Figanières (Photographie : F.V., juillet 2012)

« On ne connaît que les choses que l’on apprivoise. […] On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux. » (Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince, chapitre XXI, 1943.)

Pour appréhender la découverte de Dracénie, il convient de se dévêtir de préjugés, idées conçues et autres oripeaux de l’esprit sur les gens du Sud, la bétonisation de la Côte d’Azur, le tourisme de masse … pour découvrir avec un regard naïf la beauté d’une Provence authentique, chargée d’histoires. Province française aux confins du royaume, traie d’union entre le monde méditerranéen latin : religieux  et superstitieux, commerciale et autarcique, pêcheurs et montagnard, moderne et traditionnel … ; et celui du Nord : berceau du royaume, terreau linguistique qui s’inspira pourtant des poètes méridionaux, de l’Amour Courtois des troubadours provençaux, de la législation de Droit Romain du parlement de Provence pour édifier les institutions culturelles et politiques de le République Française. C’est alors à travers ce regard  que surgira le paradoxe de la Provence, l’anoblissant de tant de richesses et de mystères. Jean Giono, l’enfant du pays, écrivait alors «  La Provence dissimule ses mystères derrière leur évidence » [Jean GIONO, roman Colline, 1927], mais existe-t-il une région française ayant fasciné autant de peintres, d’écrivains ou de poètes, du florentin Pétrarque à l’espagnol Picasso ? Tous attirés par la beauté, la diversité et l’élégance d’une région pourtant parfois austère, rustre et sauvage.

Je connais la Provence, mais quand j’entends parler de ce pays, je me promets bien de ne jamais y mettre les pieds. D’après ce qu’on m’en dit, il est construit de béton, de décor, de piscines et de Croisette ; il est peuplé de fascistes reléguant les principes républicains au nihilisme. Alors, non, je n’irai jamais dans cette Provence qu’on me décrit. Venir se rôtir sur les plages ou se prémunir d’une connaissance superficielle ne permet nullement de créer une nouvelle histoire ou de fantasmer de nouvelles traditions. Les mêmes comparent les gens du Sud à des fanfarons de geste et de paroles. Mais le comique méridionale n’a existé qu’au théâtre et au cinéma. Il existe seulement des gens, qui l’ayant vu au théâtre et au cinéma, l’ont imité comme la bonniche qui singe une star, mais on ne les trouve que dans les villes, sur la Côte d’Azur, et ne sont pas provençaux d’origine, car, la Cote d’Azur, Marseille, Saint-Tropez, Cannes, sont peuplés de beaucoup d’étrangers. Tout comme les électeurs du Front National, venus du rapatriement d’Algérie et des vagues migratoires des retraités. Et ces fausses attitudes sont le fait de caractère que le pays n’a pas formé et contraste avec le vrai provençal, pauvre ou noble, berger ou pêcheur, mort pour la République en 1851 ou dans les maquis de haute Provence en 1943-1944. Certes, ce provençal se fait rare malgré son authenticité, la région n’était pas très peuplée avant 1950, mais il existe encore, et demeurent également encore présents ses paysages, ses valeurs et sa mémoire. Ce provençal est rare, et c’est alors seulement la curiosité qui engage à découvrir la réalité transformée. Il relève alors du devoir de défendre la vérité de cette région en comprenant son Histoire, sa réalité, ses traditions, si l’on souhaite leur pérennisation; et cela en dépit des préjugés.

La Provence (Provença ou Prouvènço en provençal) correspond, malgré les aléas de l’Histoire, à délimitation géographique de la région administrative Provence-Alpes-Côte d’Azur d’aujourd’hui.
Historiquement, alors peuplée de celtos-ligures, la région fut indépendante très tôt, dès le premier siècle avant Jésus-Christ. Et cela malgré les invasions grecques sur les rives de la Méditerranée : Massalia (Marseille), Nikaia (Nice), Antipolis (Antibes), Olbia (Hyères)… Dans l’expansion de l’Empire Romain, la Provence fut parmi les premières annexions. Les romains dénommèrent ainsi pour la première fois la région, Pronvincia, la première des Provinces. Malgré le chaos du Moyen-Age, après la chute de Rome,  la finesse de la culture provençale se développa jusqu’à à atteindre un apogée et dominer l’Europe au XIème et au XIIème siècle (littérature, poésie, musique, la fin’ amor et aspirations chevaleresques…). Le Moyen Age est également marquée par les invasions et la présence des sarrasins. En 1481, la Provence passa au roi de France Louis XI et elle fut rattachée au domaine royal en 1487. Lors de la Révolution française, la Provence est divisée en départements : Bouches-du-Rhône, Var et Basses-Alpes (futur département des Alpes-de-Hautes-Provence). Le 14 septembre 1791, Avignon et le Comtat Venaissin sont rattachés à la France. Le territoire est partagé entre Drôme et Bouches-du-Rhône et le 12 août 1793 le département de Vaucluse est créé. Toujours en 1793, la Provence retrouve le comté de Nice et donne naissance au département des Alpes-Maritimes avant que celui-ci ne repasse sous le contrôle piémontais et sarde à la Restauration. En 1860, le rattachement définitif du comté de Nice à la France ramène Nice à la Provence. Quelques territoires alpins du comté restent cependant italiens jusqu´en 1947 où un référendum demande leur rattachement à la France, mettant un terme à près de sept siècles de division de la Provence.

De par sa position centrale, la Dracénie n’a pas été détachée du Comtat de Provence, c’est à cet égard, que son territoire est une représentation fidèle d’une Provence unifiée, à travers les mouvements historiques et territoriaux qui ont touchés l’Histoire provençale, mais qui constituent également sa diversité.

A travers ces itinéraires commentés et illustrés, c’est une invitation à parcourir un échantillon de cette terre contrastée. Cette promenade présente des lieux, à travers leurs Histoires, petites ou grandes, à travers également des anecdotes personnelles, subjectives, amusantes ou curieuses. De nombreuses références ou monuments mentionnés sont sacrés, cette volonté n’est pas une pieuse dévotion. Il est nécessaire de notifier que la Provence est une Terre Chrétienne, la religion fut alors un ferment des traditions. De nombreuses chapelles, pour la plupart de l’époque romane, émaillent son territoire. Leur géographie est souvent très intéressante, parfois pittoresque; de plus elles ont traversées les siècles, comme témoin immaculés des évènements qu’elles côtoyèrent. Ces parcours proposent d’emprunter des chemins dissimulés, loin des schémas classiques des guides touristiques mais bien plus proches de l’Histoire et anecdotes qui permettront, je l’espère, à vous faire apprécier le séjour autour de Draguignan, et de retranscrire de façon la plus fidèle la Provence et ses paysages quasi romanesques.

Itinéraire 1 – Les hauts plateaux
Le Verdon et le Haut Var – Carte

Sole alla valle
E sole alla collina
Cieli infiniti
E volti come pietra
Senza speranza
Fra gli uliveti e’ nata
Gia’ la luna
Addio addio amore
Io vado via
Amara terra mia
Amara e bella

[Amara terra mia, chanson traditionnelle d’Italie méridionale]

Cet itinéraire est certainement le plus long. Le parcours traverse les contreforts alpins, balcons sur la méditerranée, mêlant ainsi les conditions climatiques des deux zones géographiques de telle sorte à en exacerber chacune d’entre elles, l’instabilité du climat y est important. Les orages peuvent y être aussi violents qu’imprévisibles.

« La paix s’installe sur les plateaux. On a le sentiment divin de se déplacer sans bouger d’un centre immobile. Le violet profond des lavandes recouvre la houle des terres. Au large on imagine que Neptune va émerger. La voile latine ne suffirait plus pour traverser ces hautes mers. L’Arcadie est heureuse. Le vent emporte les nuées …
… même métaphysiques.
Ici, la vie est vraie et logique. Le silence est le plus grand luxe de notre époque pleine de bruit et de fureur. Le troupeau se promène à travers les landes désertes avec ses clarines. On l’entend de collines en collines. Les agneaux s’émerveillent à chaque odeur, au passage des ombres et des lumières.
On joue avec l’air vierge, le soleil, l’azur et l’espace. L’écume de la vitesse fume aux talons des dieux …
… ou alors on s’en va dans une sorte de rêve vers un besoin de pureté, d’espace et de discipline. On quitte les hommes.
On monte vers les hauteurs apaisantes. Le silence se fait encore plus parfait. Et plus parfait encore la solitude. »

[Jean GIONO, Arcadie… Arcadie… (1953)  dans Le Déserteur et autres récits.]

Plateau des Suechs à Rougon

Plateau des Suechs à Rougon (Photographie F. V., juillet 2012).

Evidemment, la présentation de ce parcours est un portrait esquissé d’années de recherche à travers les institutions culturelles, les ouvrages écrits par des passionnés ; de mois passés dans ces hauts-lieux, souvent seul, dans une sorte de quête et de compréhension. Cependant, le souhait consiste à offrir les clefs qui permettront, à travers la brièveté du passage, de comprendre l’essentiel.

Cet itinéraire s’inscrit comme le premier, le principale et primordial avant d’appréhender les autres aspects de la Provence dracénoise. Son départ est Draguignan, la « capitale » [Rosette Gourre , Le Toupinblog du village d’Ampus « la cité du dragon, notre « capitale« 20 février 2011, Le Monde.fr blog].

Il se présente ensuite comme une ascension, une « montée vers l’essentiel », selon Giono. Comme remontant vers l’Amont, vers une source, à partir de laquelle s’articulera la compréhension culturelle, historique et géographique de cette région. La Vallée du Verdon, est le cœur de la Provence, elle constitue un cœur géographique, et elle est également ce cœur préservé. Cette région sauvage, présentant un peuplement très faible, qui a toujours été géographiquement très enclavée : à l’Est par le Canyon du Verdon, au Sud par le Camp de Canjuers, au Nord par la chaîne alpine. Et paradoxalement, le développement moderne, a presque accentué cet enclavement. Certaine voies routière ont succédées aux chemins de transhumance ou de muletiers que durant ces dernières décennies (ouverture routier du Canyon du Verdon dans les années 1950). La création du Camp militaire de Canjuers a définitivement coupé cette zone du développement des centres urbains de la côte méditerranéenne. La politique de protection environnementale (création de parc naturels, de zones géologiques protégées, de réserves …) ont permis le retour naturel de nombreuses espèces. En outre, la rigueur et les extrêmes variations climatiques accentuent ce phénomène  d’enclavement géographique. De telle sorte, que cette région semble avoir été figée dans le temps, les us et coutumes se sont préservés du développement d’autres zones géographiques. Il convient de comprendre ce phénomène à travers de simples exemples. L’activité pastorale, encore très active, emploie des moyens traditionnels disparus dans les autres régions françaises (transhumance pédestre durant plusieurs semaines …). De plus, les phénomènes cultuels demeurent archaïques (fêtes rurales, superstitions, légendes …). Politiquement, cette région demeure républicaine, socialiste, voir communiste, contrairement au renversement politique exacerbé s’exerçant depuis les années 1960 en sa périphérie. Elle se présente alors comme un échantillon de ce qui a été, une sorte de  remontée dans l’Histoire pour comprendre la racine ; et alors s’élèvera plus distinctement la découverte des ramifications.

« Les routes sont emmêlées comme des fils  de laine avec lesquels les chats ont joué. Qu’il s’agisse de redescendre vers les pays faciles ou de continuer de monter vers l’essentiel elles tournoient sur elles-mêmes comme si elles ne pouvaient se décider à vous conduire à un endroit à un autre. Elles n’ont pas envie de vous engager vers Draguignan et elles se refusent à vous conseiller la montagne. Il faut prendre soit même la décision. » (Jean GIONO, Il est vain de vouloir réunir, 1961.)

Draguignan, une capitale provençale déchue ? Située entre la Méditerranée et les Alpes, entre Provence et Côte d’Azur, d’origine ligure et romaine, la cité du Dragon est rattachée au royaume de France en 1481. Elle sera préfecture du Var jusqu’en 1974. Dominée par le Malmont [Le Malmont est une montagne surmontée de petites proéminences collineuses composées de roches calcaire, qui culmine à 551 mètres et surplombe la ville. En langue provençale, mau mount signifie « mauvais mont ». On y trouve aussi le toponyme Mare Couale de signification équivalente]. Draguignan accueille la sous-préfecture, une importante administration militaire et la cour d’assises du Var. Ses principales avenues furent dessinées par le baron Haussmann, Clémenceau y fut sénateur et son maire, Joseph Colomb, fut l’un des 80 députés qui votèrent contre l’octroi des pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet 1940. Autrefois, principalement agricole (huile d’olive, vin…), l’économie dracénoise est, aujourd’hui, orientée vers le secteur tertiaire. Draguignan semble être une ville tranquille, point de passage obligé pour les touristes se rendant dans l’arrière-pays. Ville paisible, presque morne, moribonde d’une activité économique et d’un rayonnement quasi inexistant. Cependant, ce portrait peu valorisant ne fut pas toujours ainsi dépeint. En effet, au cours du Moyen Age, Draguignan était parmi les villes les plus peuplées de Provence avec Marseille, Aix et Nice. A la révolution française, elle devient  préfecture du département du Var, département alors le plus étendu de France métropolitaine. Cependant, la Révolution n’a pas été totalement bénéfique pour la cité : de nombreux établissement religieux (couvent, églises …) furent ravagés ou détruits par la violence anti cléricale révolutionnaire, détériorant ainsi notablement le patrimoine culturelle de la ville. La position géostratégique du département du Var (alors frontalier avec le duché de Savoie, le Comté de Nice n’étant rattaché à la France qu’en 1860 lors de l’Unité italienne) renforce l’importance administrative de la préfecture. Le 24 mars 1860, Napoléon III et Victor-Emmanuel II signent le traité de Turin, qui prévoit l’annexion de Nice à la France en échange d’une aide de Napoléon III contre les Autrichiens et d’une assistance à Victor-Emmanuel II dans son désir d’unifier l’Italie. Un plébiscite est organisé. Le circondario di Nizza devient français.

Département du Var avant 1860

Département du Var avant 1860, Archives départementales du Var.

C’est à cause de cette place géostratégique importante que le pouvoir central y envoya des personnalités politiques telles que Clémenceau, le Baron Haussmann (qui s’exerça à dessiner les avenues dracénoises avant celles de Paris) …

D’un point de vue économique, Draguignan, avec le développement du chemin de fer, disposait de la principale gare du réseau des Chemins de fer de Provence entre Nice et Marseille. La cité était en pleine prospérité, loisirs, administrations et population s’y développèrent. Mais, au cours de la seconde moitié du XIXème siècle et au cours du XXème siècle, la cité du dragon fut déchue. Suite au Traité de Turin, et à l’annexion française du comté de Nice, le département du Var fut amputé de sa circonscription la plus orientale, celle de Grasse-Antibes. Suite à cette modification, le fleuve Var ne coula plus dans le département auquel il a donné son nom, (curiosité unique dans la toponymie des départements français). En 1944, l’armée allemande détruisit les principaux ponts de la ligne ferroviaire Aix – Draguignan – Nice,  situés dans les Alpes-Maritimes et la compagnie, suite à la création de la S.N.C.F n’eut pas les moyens financiers de les faire reconstruire. Début 1950, la ligne est définitivement fermée.

En 1974, Draguignan perd la préfecture. L’affaire est unique. Pour la première fois, le pouvoir central décide le transfert d’une préfecture. La décision du conseil des ministres qui annonce le transfert de la préfecture du Var de Draguignan à Toulon est prise le 25 septembre 1974. La nouvelle est inattendue, même si, dans l’histoire du Var, la revendication toulonnaise revenait sur le tapis de loin en loin depuis qu’en 1793 le choix de la petite ville de Draguignan, à l’intérieur des terres, avait été fait. Toulon possédait déjà la préfecture maritime et il était acquis que, pour des raisons de prérogatives entre les deux préfets, ils ne pouvaient se trouver dans la même ville. Par ailleurs, Toulon était très excentrée par rapport au reste du Var, bien que la ville de Draguignan ait perdu de sa centralité lorsque l’arrondissement de Grasse avait été adjoint au comté de Nice pour créer le département des Alpes-Maritimes en 1860. Et surtout il paraissait de bonne politique d’aménagement du territoire de ne pas tout concentrer dans une ville qui était déjà le grand centre économique et social du département et d’aider à maintenir une activité dans une petite ville et à l’intérieur des terres. La décision du gouvernement Chirac remet donc tout cet équilibre en question. Les motivations sont, à l’évidence, politiques. Bien que Maurice Arreckx, le maire de Toulon, s’en défende, il paraît ainsi retirer le bénéfice de son soutien à Valéry Giscard d’Estaing, élu à la présidence de la République quelques mois auparavant. Arreckx adhèrera aux Républicains indépendants, le parti du président, l’année suivante. Comme les Toulonnais, il ne peut que se réjouir de ce choix qui consolide ses positions et celles de sa ville. Mais le rôle d’Aymeric Simon-Lorière, ancien membre du cabinet de Michel Debré, a probablement été déterminant. Bien que maire de Sainte-Maxime, il vise à terme la conquête de Toulon, où il a été élu député, puis conseiller général en 1973, et ses ambitions servent l’UDR dont il est membre. La promotion de Toulon se joue donc sur fond de rivalités au sein de la coalition des giscardiens et des chiraquiens. Mais, pour l’heure, la décision est ressentie comme une agression par la gauche varoise dont le « patron » est le sénateur-maire socialiste de Draguignan, Edouard Soldani. Le transfert vise à les affaiblir l’une et l’autre. Soldani domine depuis près de vingt ans la scène politique locale. Il préside le Conseil général et l’association des maires du Var. Il est le « baron » varois de Gaston Defferre, qui viendra le soutenir le 17 novembre avec François Mitterrand. Mais par-delà les clivages politiques, la décision heurte le Var des petites villes et des villages de l’intérieur, représentés dans le reportage par l’un de leurs maires et la reconstitution d’une deuxième sous-préfecture à l’intérieur du département, à Brignoles (où elle avait supprimée en 1926), ne compense pas ce qui est ressenti comme un geste de mépris. Elle révolte, bien évidemment, les Dracénois. Les uns et les autres ont l’impression que, dans cette bataille, entre les « gros » et les  » petits  » (Draguignan est une petite ville de 22 000 habitants, alors que Toulon pèse presque dix fois plus), Paris a pris fait et cause pour les premiers, d’autant que Draguignan a donné la majorité au candidat de la gauche à l’élection présidentielle du mois de mai précédent. Dès le 28 septembre, une première manifestation avait réuni 3 000 Dracénois. Deux jours après, le Conseil général, convoqué en réunion extraordinaire, avait voté contre le transfert par 29 voix contre 12. Il avait été suivi par 143 maires sur les 153 membres de l’Association des maires du Var. Le 20 novembre, 400 élus varois défileront, à Paris, sur les Champs-Élysées. Dans ce climat de révolte, la signature du décret entérinant le transfert par Jacques Chirac, chef du gouvernement, le 4 décembre, sera ressentie comme une provocation. Draguignan connaîtra ce jour-là une journée de violences avec des barricades, le sabotage des installations électriques de la préfecture, des heurts violents entre la foule qui a envahi ses abords et les CRS, des élus frappés, plus de 80 blessés, etc. Dès le lendemain, le préfet du Var s’installera à Toulon. Le Conseil général refusera un temps de se rendre dans la nouvelle préfecture et 76 maires présenteront leur démission. Puis viendra le temps de la négociation et du compromis. Draguignan bénéficiera d’aides au développement régional, les fonctionnaires ne seront pas mutés d’office et un train assurera pour eux la liaison entre Toulon et ce qui est désormais une banale sous-préfecture. En fait, le choix pour Draguignan avait été fait avant. Il était lié au camp de Canjuers. La vocation de la ville passait de l’administratif au militaire, avec, notamment, la création de l’Ecole d’application de l’artillerie, par regroupement des écoles de Nîmes et de Chalons-sur-Marne. Mais une page de l’histoire de la ville et du département avait bel et bien été tournée.

Manifestation des élus varois, nov. 1974

Manifestation des élus varois, nov. 1974 (Photographie : Jean Puech (1927-2007) ; Photothèque: une collection photographique de 1945 à nos jours, Préfecture du Var).

La cité du Dragon, cité natale. Le dragon est une créature légendaire représentée comme une sorte de gigantesque reptile. Dans de nombreuses  mythologies à travers le monde, on retrouve des créatures reptiliennes possédant des caractéristiques plus ou moins similaires, désignées comme dragons écailleux, généralement capables de cracher du feu et de voler grâce à des ailes de cuir semblables à celles des chauves-souris.

Une légende ancienne rendue publique récemment a mis au jour un dragon peu connu, le dragon de Draguignan, voisin et cousin de la Tarasque de Tarascon dont il n’a pas la célébrité. Cette légende, dont l’écriture remonte au Moyen Age, affirme qu’un dragon fabuleux aurait donné son nom à la ville de Draguignan. La petite histoire raconte qu’autrefois un dragon vivait à Draguignan et qu’il faisait peur à la population qui le craignait. Un homme réussit à les en débarrasser en le tuant lors d’un combat .Ce dragon est quand même resté très présent dans leurs mémoires et plus tard ils firent du vainqueur un Saint, Saint Hermentaire étant le Saint patron de Draguignan. Draguignan était à l’origine construit sur la colline de la tour d’horloge, très imposante, qui domine maintenant avec son campanile en fer forgé et offre une vue splendide de la région depuis son sommet. Le nom Draguignan vient du mot latin draco, signifiant le dragon car selon la légende, les pèlerins qui faisaient route vers le monastère des Iles de Lérins (Alpes Maritimes) était fréquemment effrayés par un dragon qui habitait dans les marais brumeux entourant la ville. Le dragon fut tué par l’ermite Saint Hermentaire vers l’an 400, dont on peut admirer la statue dans l’église Saint Michel de Draguignan et la fresque à la chapelle des Minimes. Les latinistes expliquent alors que Draco dénomme ce dragon vaincu et que la terminaison guinum est relative aux habitants. La lutte entre un Saint et un dragon, qui représente le païen non converti ou plus largement les forces du mal, est une allégorie classique dans l’histoire de la chrétienté. Ces forces du mal seraient également la représentation des maladies (paludisme..) régnant et décimant la population, à l’époque médiévale, dans le bassin dracénois, et notamment dans le quartier de Saint Hermentaire, sur les rives de la rivière La Nartuby. Une explication plus rationnelle proviendrait de fouilles récentes qui ont permis la découverte d’une église paroissiale datant du VIe siècle, elle-même bâtie sur une villa construite au Ier siècle. Cette villa s’élevait sur la voie romaine allant de Fréjus à Riez. A cet égard, la villa romaine aurait peut-être appartenu à un dénommé « Draconius » propriétaire du domaine gallo-romain; ayant ainsi donné son nom à la cité. Cette thèse soutenu par l’abbé Raymond Boyer [Abbé BOYER [1925-2011]: homme d’Eglise, archéologue, membre de la Société d’Etudes Archéologiques et Scientifiques de Draguignan et du Var] s’oppose ainsi à la légende médiévale de la lutte du dragon et de Saint Hermentaire comme explication du nom de Draguignan et relèverait les racines du nom de Draguignan à l’époque romaine. Dragonianum, forme latine de Draguignan doit ainsi dériver Draconius.

Armoiries de Draguignan

Armoiries de Draguignan. Salle des Etats de Provence, Hôtel de ville d’Aix en Provence. (Photographie F. V., janvier 2009).

A Ampus Des vestiges attestent de la présence romaine qui se manifestait notamment par une foire au quartier du plan d’Ampus. La voie aurélienne reliant Fréjus à Riez traverse la commune d’est en ouest. Le village fut fortifié par les Comtes de Provence et servit de refuge aux protestants qui menaçaient Draguignan pendant les guerres de religion. Le «castrum de Rainier» ou « de Rainerio » a fait l’objet d’une étude. Le Castrum est un camp militaire romain, contrairement à toutes les armées antiques, lorsque les légions de la Rome antique en campagne quittent la zone totalement sûre, elles construisent chaque soir un camp fortifié (castrum en latin, pluriel : castra). Cette habitude est très ancienne, et remonte peut-être aux réformes de Camille (Marius a plus tard codifié ces habitudes).

Les Carraires traversent les plaines du sud-est au nord-est. La grande carraire traversant la plaine, dont le tracé est bien conservé, grimpe en direction de la montagne de Lagne (au sein du camp de Canjuers utilisé dans le passé en pâturage d’été).  Les seigneurs donnèrent le droit de passage pour permettre le passage des troupeaux de moutons partant de la basse Provence (Bouches du Rhône, Var) vers la haute Provence, lors de la transhumance. Les petites carraires servaient à faire circuler les troupeaux dans l’aire de la communauté et les grandes carraires permettaient de traverser toute la Provence.

En 2005, en parcourant le plateau d’Ampus, dans le bois des Clapouires, surplombant les gorges de Chateaudouble, après 2 heures de marche à travers la végétation, sans aucun sentier, je suis arrivé sur un talus constitué de pierres sèches, effondrés et semblant protéger un espace aujourd’hui devenu garrigue. Cette endroit dispose d’une vue imprenable sur la vallée de la Nartuby. Quelques mois plus tard, des recherches entreprises par la Société d’Etudes Archéologiques et scientifiques de Draguignan et du Var, sous l’égide du ministère de la culture, permirent d’identifier l’emplacement d’un oppidum censé, semble-t-il, protéger les populations des guerres intestines confrontant les différentes tribus celto-ligures de la région durant l’Age du Fer, du VIIIème au Ier siècle avant J-C ; utilisé par la suite par les romains. Il existe de nombreux oppida en Provence. Tous ne sont pas encore découverts, et j’ai pu, avec grand plaisir, le constater. Selon la définition la plus communément admise, un oppidum (du latin oppidum qui signifie lieu élevé, fortifications) est donc un lieu élevé (généralement situé sur une colline) dont les défenses naturelles ont été renforcées par la main de l’homme au temps des Celtes. Les premières mentions et descriptions des oppida nous sont parvenues grâce à Jules César dans La Guerre des Gaules. Cependant, il est nécessaire d’apporter ici une nuance sur l’utilisation du terme « oppidum ». En effet, César désigne sous ce nom une agglomération de quelque importance, de caractère politique ou religieux. En 2008, je fus nommé membre de Société d’Etudes Archéologiques et scientifiques de Draguignan et du Var.

Rue Ampus F.V

Rue Ampus F.V

Toujours concernant Ampus,  Christophe, ami d’enfance, originaire du hameau « Les Vergelins » entre Ampus et Vérignon, m’invita un jour chez ses grands-parents, et me relata l’enfance de sa grand-mère. Il raconta comment celle-ci, lorsqu’elle « descendait à la ville », à Draguignan, pour vendre les récoltes au marché devait se prémunir des loups en jetant durant le parcours des morceaux de viande afin d’éviter que les chevaux ne soient attaqués. Les temps changent …

L’arrivée à Châteaudouble est féerique: « Châteaudouble, double château, la rivière sera ton tombeau ». Nostradamus, Les prophéties, 1555.  Michel de Notre-Dame, le célèbre Nostradamus, médecin et astrologue, né en 1503 à Saint-Rémy de Provence  a cité Châteaudouble dans ses prophéties. L’astrologue déduisant ainsi que l’érosion causera un jour l’effondrement du village. Châteaudouble est un bijou méconnu qui mérite un halte au café du village, d’où vous profiterez d’une vue magnifique sur les Gorges de Châteaudouble. Village autrefois divisé en deux parties également fortifiées, d’où vient probablement son nom. Cité en 1021 « Castellum Diaboli » puis en 1038 « Castel Dulpo » En provençal « Casteoudouble » On a retrouvé sur le territoire de Châteaudouble un des plus vieux gisements préhistoriques reconnu en Provence : la grotte des chauves-souris, situées dans les gorges de Châteaudouble.  Le cimetière du village, situé en aplomb (influence du monde latin), offre une promenade littéralement romantique, d’où l’on profite de la meilleure vue. Comme en Italie méridionale le cimetière est souvent situé au-dessus du village, du monde matériel au plus près du ciel. Alors, qu’en France, il est souvent en lisière de la cité, en dehors. A cet égard, Châteaudouble démontre le latinisme des coutumes de la Provence.

Village autrefois divisé en deux parties également fortifiées, d’où vient probablement son nom. Cité en 1021 « Castellum Diaboli » puis en 1038 « Castel Dulpo » En provençal « Casteoudouble » On a retrouvé sur le territoire de Châteaudouble un des plus vieux gisements préhistoriques reconnu en Provence : la grotte des chauves-souris, situées dans les gorges de Châteaudouble. Pendant la période préromaine, les habitants qui étaient un peu plus nombreux, ont construit des habitats de hauteur fortifiés (oppidum, castellum). Il n’existe pas de vestiges de l’occupation romaine car les habitants avaient opposé une résistance farouche à celle-ci. Ils s’étaient établis bien avant sur un site assez remarquable où se trouve actuellement le cimetière. Le général romain se serait retiré en disant que c’était « spélunca latronum », une caverne de brigands. Au cours des années, la falaise dont l’accès n’était possible qu’au nord-ouest fut fortifiée et défendue par une tour construite au Moyen Age. Les habitants édifièrent une citerne qui était alimentée à partir de l’eau recueillie par la toiture de l’église Notre Dame du Fort, bâtie sur le rocher à quelques mètres de la réserve d’eau. La tour date du Xème siècle, il lui était adjoint un petit bâtiment pour la garnison. La citerne, les fortifications, les ruines de l’église sont encore visibles actuellement. Vers le milieu du XVème siècle, le village construit sur le rocher sera abandonné, l’emplacement se révélant trop exigu. Il sera reconstruit là où il se trouve actuellement, autour de la nouvelle église dédiée à Notre Dame de l’Annonciation. L’ancienne église sera utilisée par les Pénitents Blancs jusqu’à la révolution pour accomplir les offices. Châteaudouble, compte tenu de sa situation ne connaîtra qu’une circulation muletière par des chemins caladés [le verbe calader signifie paver, empierrer. Une rue caladée, ou plus simplement une calade, désigne en Provence une rue en pente pavée. Le mot viendrait de l’occitan calar signifiant descendre. Racine étymologique du mot escalade, en français]. Aucune route ne desservira le village jusqu’au XIXème siècle. C’est probablement pour cette raison que l’on connaîtra le pays comme celui des « Gimerri », (mulets) surnom donné aux habitants qui effectuaient souvent les transports à dos d’hommes, ou avec des mulets. Les habitants sont au nombre de 370 au début du XIVème siècle ; en 1765 ils sont 982, et la population se maintiendra aux environs de ce chiffre jusqu’à la fin du XIXème siècle.

«  Passé la Nartuby et monté jusqu’à la route de Montferrat, toute cette basse noble continue à gonder dans les lointains pendant qu’au rythme du pas entrent dans le jeu d’orgues mille flûtes et hautbois et trompettes et trombones et clarinettes de dieu. C’est, à vos pieds, une touffe de lavande, ou, si vous avez de la chance, une de ces couleuvres aux muscles algébriques recouvertes elle aussi de lichen doré; c’est, à la portée de votre main, un tronc de bouleau doux au toucher comme le flanc d’un poulain, ou, à la hauteur d’homme, la branche embaumée d’un tilleul; c’est, au-dessus de votre tête , le vol éblouissant des geais, le javelot noir d’un merle, la mousseline envolée qui, à chaque battement d’aile, change de couleur, de ton et de forme, entraînant liards de tonnes d’Alpes et de collines. C’est enfin, à mesure qu’on s’avance du côté de Peygros, les décors de premier plan qui se mettent en place : l’austère Mourre du Chanier, Berbené, le haut de Chasteuil, Villars-Brandis, les rocs de Castellane badigeonnés de bleu charrette, plantés dans une brume en duvet de poussin.

Maintenant, on entre dans le désert d’un haut plateau à l’altitude moyenne de 1000 mètres sur 40 kilomètres de long et 15 kilomètres de large. C’est le plan de Canjuers. Comme pour la scène d’un grand théâtre sur laquelle va jouer la solitude, les montagnes en place sur tout le pourtour de l’horizon ne vont pas bouger, le piéton lui-même continuant sa marche a l’impression d’être immobile. Il est à la place crayonnée sur « le plateau » (c’est le cas de le dire) par un grand metteur en scène, et il y joue son rôle sans en bouger. Rien de plus corrosif pour le moderne que ce haut lieu. L’air est d’une pureté exquise : le poumon devient un appareil de connaissance ; il goûte l’âpreté des glaciers, il assimile les espaces vierges, il respire enfin autre chose que ses résidus et les laissés-pour-compte, il est aux prises avec les éléments même de la vie. Et pour nourrir de nourritures terribles les grands besoins métaphysiques, le piéton, ici, se rend compte que la vie détruit le moderne. Même l’avion qui passe parfois très haut en travers de ces contrées, à l’heure du courrier Paris-Nice ou Paris-Rome, disparait effacé par ‘éclat neuf de la vie et confond son ronronnement avec celui d’une ruche. Ou même avec simplement celui du silence. Le silence ! Ce grand producteur de globules rouges dans tous les sens, le silence animateur de l’âme, le silence qui marche « les dents serrés » à côté de vous. Dont on fait partie d’ailleurs ce tintement de clochettes : chèvre ? Bélier ? ville d’Ys ? Froissement des plumes de l’ange ? Ce grondement : vent ? tonnerre d’Azur sans nuage ? effondrements dans de lointains soleils ? Ces longs abois : seuils de fermes (qu’on ne voit pas, et il n’y en a pas d’ailleurs) ? troupeaux ? suintements de l’enfer ? On ne sait. Tout est paisible et plus surement la magie que l’ordinaire. Sur ces vastes étendues désertes se dressent constamment les mirages de l’esprit. Alimentés de nourritures primordiales, les sens entrent en ivresse. Les grandes terreurs, les grandes espérances, courent avec les ombres des nuages ; le sel est souple comme le tremplin même de l’héroïsme. Le large de ces terres enchantées vous absorbe peu à peu. Il n’y a plus que cette piste qui entraine votre pas. L’herbe ne l’est plus qu’à vos pieds ; pour peu que votre regard s’éloigne, elle est de bronze ou d’or, mais d’un bronze ou d’un or si magique que le moindre souffle de vent en transmue le métal en matière qui n’a plus aucun nom dans les classifications ; c’est de l’argent, c’est de l’écume, c’est de l’écume d’argent, du poil de monstres, le plus vaste entrepôt de monde de fils de la Vierge ou le pavé de l’enfer, enfer toujours présent dans les délices trop subtiles de ces terres où toute l’harmonie se résume et se condense. La réussite est si parfaite qu’on a constamment le terreur de voir tout s’effondrer et se confondre si la caille ne claque pas du bec comme il faut, si cette fleur qui se balance perd un pétale, si l’épervier qui tourne en rond au-dessus de vous rate un virage. Mais la caille connait parfaitement sa partition, la fleur est solide et l’épervier est depuis longtemps passé maître en circumnavigation. Ainsi on a la sensation très nette que tout l’équilibre dans lequel on jouit tient à des riens ; ce qui est le propre du suspens magique. » (Jean GIONO, Il est vain de vouloir réunir, 1961.)

La Praou, Blieux

La Praou, Blieux (Photographie F. V., juillet 2012).

Jean Giono décrivait l’endroit ainsi : « Est-ce à perte de vue le champ de bataille des légions célestes ? » (Jean GIONO, Il est vain de vouloir réunir, 1961). Canjueurs, le désert!

Le plan de Canjuers est un plateau calcaire aride de Provence, situé dans le département du Var dans les Préalpes de Castellane, au sud des Gorges du Verdon et au nord de Draguignan. La destinée militaire de Canjuers, ce plateau aride, est en effet inhérente à son histoire. Appelé « Campus Julii» (camps de Jules) lors du passage de Jules César pour la conquête de la Gaule, le plan conserve notamment plusieurs bornes milliaires romaines. Le plan est aussi un important lieu de fouilles archéologiques. Il conserve de nombreux fossiles datant du Jurassique et du Crétacé. Durant le printemps et l’été 1944, le plateau de Canjuers a servi de base au « maquis Vallier », le maquis Armée secrète du Var. Ce plateau abrite depuis 1970 le camp de Canjuers géré par l’Armée de Terre. C’est le plus grand camp militaire d’Europe: 60 km sur 20 km. Il dispose de zones dédiées aux combats de chars (Champ de tir de Lagne pour les tirs mobiles, champ de tir des Amandiers pour les tirs fixes), aux tirs d’artillerie et au combat d’infanterie et permet des manœuvres interarmes. Il dispose, en outre, de la rare possibilité d’autoriser des tirs d’exercice de lance-roquettes multiples. Ce lieu tant aimé de Jean Giono est alors devenu interdit au public. Il ne peut être visible qu’après de longues heures de marches à travers les montagnes qui le bordent. D’une altitude moyenne de 900 m, le plateau de Canjuers est divisé en deux grandes parties: le Grand Plan de Canjuers (décrit par Jean Giono dans l’extrait ci-dessus) et le Petit Plan de Canjuers. Le plateau est encerclé par des chaînes de montagnes comme le Grand Margès (1 577 m) au nord, la Correiasse (1 125 m) à l’ouest, la serrière de Lagne (1 112 m), le collet de l’Aigle (1 118 m) et la montagne de Barjaude (1 173 m) au sud. D’autres nombreux plans, plus petits, sont présents derrière les montagnes comme le plan de Cluaye, le plan du Château de Lagne, le plan d’Auveine ou le plan de Sauvechane. Sa roche calcaire et karstique a créé un terrain accidenté, composé de nombreux avens comme le Grand Aven de Canjuers, l’Aven de la Nouguière ou le Clos deï Faioun. Sur le plateau, la végétation est rare car son sol est très aride, elle est surtout composée de garrigue (petits buissons, herbes et plantes aromatiques). Les forêts sont présentes sur les montagnes alentour. Les arbres sont majoritairement des chênes, des pins sylvestres et des pins d’Alep. Le climat y est très rude, l’amplitude thermique y est très ample, les températures l’hiver peuvent descendre jusqu’à -25 degré et montent jusqu’à +40 degrés durant l’été, ces écarts le Mistral souvent violent sur ce plateau expliquent la rareté de la végétation. C’est aussi un lieu de spéléologie : c’est l’un des plus grands bassins d’eau souterraine d’Europe, grâce aux nombreux avens. Avant la prise du territoire par l’Armée de Terre, la région avait une très faible densité de population, mais il y avait plusieurs propriétés, fermes et hameaux qui sont maintenant en ruine, détruits ou habités par les membres du camp. On peut citer les hameaux de Saint-Bayon, Chardan, la Barre ou les fermes de la Grande Nouguière, Cluaye, la Médecine, le château de Lagne, le Cabaret Neuf et d’autres encore.
Le camp miliataire fut créé en 1970, avec ses 35 000 hectares de terrain, dont 14 hectares de camp bâti, le camp de Canjuers est le plus grand camp militaire d’Europe. Déjà partiellement utilisé entre les deux guerres, il sert actuellement à l’instruction aux unités françaises et étrangères. Le camp de Canjuers et son polygone de tir sont des terrains militaires dont l’entrée est contrôlée et strictement interdite. Le danger est réel malgré la précision des tirs (chars, missiles sol-sol ou air-sol, fantassins) et aussi du fait de la persistance d’engins non explosés. Les restes d’engins explosés, non encore décontaminés ou non éliminés présentent un risque de toxicité variable selon leur nature. Le camp est actif tous les jours de la semaine. Le risque incendie y est majeur dès le début de l’été, aggravé en périodes de sécheresse. Le survol aérien est interdit (la portée verticale maximum des tirs des chars est de 16 km). Le Droit militaire s’y applique en plus du Droit civil, et sans minoration de ce dernier (circulation, faune, flore, forêts…). Cependant, la circulation automobile est autorisée sur les deux voies nord-sud qui le traversent (avec interdiction de quitter la route). Il est de l’intérêt de tous d’y respecter la priorité, la courtoisie et la compréhension, particulièrement au niveau des croisements avec les routes ou pistes de travail (gros engins). La politique du camp a toujours été de protéger le patrimoine que l’État lui a concédé. Cela va même plus loin que la seule protection, cela passe par l’entretien, la réparation, la mise en valeur et le respect de l’environnement. Seule la petite chapelle de la Barre, dans le petit Plan, a été détruite. De nombreuses Bastides et villages abandonnés sont dispersées à travers le camp. Les bastides étaient de grandes fermes permettant de vivre en autarcie dans ces lieux arides, elles disposaient au moins d’un puits ou d’une citerne et d’un four à pain. On en dénombrait trente-deux, certaines sont encore utilisées temporairement par les bergers ou chasseurs. Leur nom persiste sous forme de toponyme. Son sol et son sous-sol marqués par les colonisations humaines et animales les plus lointaines n’ont pas fini de livrer leurs richesses aux scientifiques. Le respect des normes et des règlements imposés par les ministères, la coopération étroite avec l’ONF et les chercheurs, la présence d’une société de chasse préservent l’environnement des atteintes de la vie moderne. La préservation environnementale a permis, entre autre, le retour du loup dans le Var. En 1999, seulement 2 loups étaient présents sur les plateaux du Haut Var, venus du Mercantour. Leur retour naturel dans le Var (alors que le loup avait disparu depuis plusieurs décennies) fut remarquable et souhaitable et démontre la réussite de la politique de préservation environnementale dans cette région et sur un même territoire (création du Parc Régionale Naturel du Verdon en 1997, création du Camp de Canjuers en 1974, création de la Réserve Naturelle Géologique de Haute Provence en 1984).

Photographie du village de Brovès par Jeremy Saint-Peyre, photographe et reporter (Life, Le Monde…) de la série The Withered Corpses : The Village, avril 2011.

Photographie du village de Brovès par Jeremy Saint-Peyre, photographe et reporter (Life, Le Monde…) de la série The Withered Corpses : The Village, avril 2011.
http://vimeo.com/30822918

En 2008, lors d’une de nos excursions, avec Christophe, toujours le même, nous sommes rentrés dans le village, strictement interdit, de Brovès. Au petit matin, une patrouille de la police militaire nous trouvât. Par chance, Christophe, de par sa qualité de chasseur à Ampus parcourant souvent la frontière du camp militaire, connaissait les gardes, ce qui nous préserva d’une condamnation ; alors que les amis qui nous accompagnaient, cette nuit-là, écopèrent d’une amende devant le tribunal de police quelques mois plus trad.

À 20 km de là, à la bastide de la Médecine, à l’ouest du Grand-Plan, la mère Bousquet, une guérisseuse y officiait. Considérée comme la dernière sorcière de Provence avant la Première Guerre mondiale Aujourd’hui encore la superstition opère et le lieu est fréquenté pour conjurer le mauvais sort. Entre 2006 et 2008, j’ai eu l’occasion de pénétrer dans le Camp militaire, grâce à la complicité de l’agent ONF, responsable de la zone. Me rendant à la bastide de la Médecine, je n’y ai rencontré aucune magie noire mais des fruits de murier de taille inimaginable et délicieux mais fortement laxatifs après une consommation exagérée.

Le résistance durant ces hauts plateaux désertiques fut importante durant la Seconde Guerre Mondiale. Plusieurs maquis évoluèrent dans le plan de Canjuers. Une centaine de maquisards ont évolué dans le secteur du Malay, y formant le camp Lafayette (SAP), et furent surtout actifs lors du débarquement de Provence, lors des parachutages nocturnes. Le plus important des maquis fut le maquis Vallier. Le maquis Vallier est un maquis, organisation de la Résistance intérieure française à l’Occupation nazie durant la Seconde Guerre mondiale, de février à août 1944. Il est le maquis de la principale organisation de Résistance du Var (et de zone Sud), à savoir l’ensemble constitué par les mouvements unis de la résistance (MUR) et leur branche « militaire », l’Armée secrète (AS). Il est dirigé par le lieutenant Vallier (Gleb Sivirine). Il se déplace beaucoup dans le Haut Var pour à la fois échapper à l’ennemi et faire connaître son existence (14 décrochages), puis au moment du débarquement (du 15 au 23 août) traverse le département, rejoint les Maures et participe aux combats à Collobrières et Hyères d’abord puis libère seul la presqu’île de Giens. Voici le témoignage du Général Saint-Hillier: « Porquerolles et San Salvador se rendent aux bâtiments de guerre américains. Un groupe FFI, commandé par le lieutenant Vallier, le seul à avoir participé à notre combat, capture 154 Allemands à La Badine ». Ensuite le maquis dans son ensemble s’engage dans le bataillon d’infanterie de marine du Pacifique de la 1ère division française libre, commandée par le général Diego Brosset, fait la campagne d’Alsace et de celle de l’Authion qui termine la guerre en avril 1945. Une rue de Giens et une place du village des Salles-sur-Verdon portent le nom de maquis Vallier et de Gleb Sivirine. On peut lire sur la plaque qui se trouve aux Salle : « 1911-1990. Il fut le lieutenant Vallier, commandant le maquis AS du Var. Hommage des MUR (Mouvement unis de la Résistance) au village des Salles, îlot de la Résistance Varoise ». La Médaille de la Résistance a été conférée à Gleb Sivirine. Le lieutenant Vallier a tenu très régulièrement son journal « De Farigoule à Canjuers » : « Ce matin, on a fait une marche d’entraînement avec le deuxième groupe, sac au dos. Je les ai emmenés jusqu’au sommet voisin, qui est à 1577m et pour bon nombre d’entre eux, ça a été la plus haute altitude à laquelle ils soient arrivés de leur vie. Il y a de là-haut, une vue splendide et ce n’est pas sans émotion que j’ai revu, d’un côté les chaînes italiennes si souvent contemplées pendant la guerre et de l’autre côté le Ventoux au pied duquel je voudrais tant aller passer quelques heures! » (Lieutenant Vallier, 71ème jour de maquis, Lundi 1 mai 1944-  De Farigoule à Canjuers – Le cahier rouge du maquis.)

Maquis détachement Toto de la 2ème compagnie FTPF  en juillet 1944 – secteur Verdon -

Maquis détachement Toto de la 2ème compagnie FTPF en juillet 1944 – secteur Verdon -La Melle, hameau (en ruine) du village de Blieux.

Dans son journal de maquis, le lieutenant Vallier relate la visite de l’inspecteur de maquis : « Or l’autre jour arrive le dénommé Valmy, inspecteur du maquis. Le terme me plaît beaucoup, car cet excellent inspecteur a rendu pour la première fois visite à mon maquis au bout de mon 50ème jour de fonction. » Il le décrit alors comme un « un petit bureaucrate qui sort pour la première fois hors de sa ville confortable, (il est évidemment venu en voiture aussi loin que la route le permet), ce petit bureaucrate vient vous dire qu’il faut se tenir en alerte! »[Lieutenant Vallier, 55ème jour de maquis, Lundi 17 avril 1944-  De Farigoule à Canjuers – Le cahier rouge du maquis]. Il s’agit alors d’Édouard Soldani, qui est aussi, entre autres responsabilités, avec Garrus, chef MUR de l’arrondissement ; et qui sera maire de Draguignan  de 1959 à 1984. Édouard Soldani (19 septembre 1911 – 18 avril 1996) était un homme politique français, membre du Parti socialiste. Sénateur du Var (1946-1958 et 1959-1986) ; Maire de Draguignan (1959-1984) ; Vice-président (1945-1956) puis président du conseil général du Var (1956-1985). Il était surnommé « le vieux lion ». Il signait toujours en vert, qui était sa couleur fétiche depuis son entrée en Résistance. A la Libération, il fut nommé chevalier de la Légion d’honneur, et décoré de la Croix de guerre 1939-1945 ainsi que de la Médaille de la Résistance.

Comps-sur-Artuby est situé entre le mont Clare (1 267 m) et le mont Lague (1 109 m), entre les vallées du Jabron, du Verdon, le canyon de l’Artuby et les clues de la Bruyère. Comps est situé à 900 mètres d’altitude, autour du rocher qui supporte l’église Saint-André. L’ancien village fortifié se trouvait autrefois sur le rocher. La commune est composée de nombreux hameaux hors du bourg comme Oribau (Avelan), Saint-Bayon, Chardan, Cuiros, Don, Doureisse, Endosse, Guent, Jabron, Sauvechane ou la Souche. Plus de la moitié du territoire de la commune dont les hameaux de Chardan, Saint-Bayon, Sauvechane ou Doureisse sont dans le camp de Canjuers. Au XVIIe siècle, la vigne y était si abondante que les curés prélevaient la dîme en vin et non en foin. Les Templiers de la maison de Ruou (Commanderie de Villecroze) y possédaient une importante commanderie qui devint après l’abolition de l’Ordre en 1312, chef-lieu d’une commanderie de Malte, jouissant de très importants revenus. En 1342, la communauté de Bargème est rattachée à la viguerie de par le comte de Provence. Au début du XVIe siècle, les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem devinrent seuls seigneurs de Comps en acquérant la part de seigneurie qui avait été inféodée en août 1381 en faveur de Fulco de Pontevès, et qui dépendait précédemment du comté de Provence Pendant les guerres de succession de la reine Jeanne, le village et se remparts furent détruits par Charles de Duras ; les habitants s’établirent alors dans la campagne où ils bâtirent neuf hameaux: Oribau, Saint-Bayon, Chardan, Don, Doureisse, Guent, Jabron, Sauvechane et la Souche. La paix revenue, le village fut reconstruit sur le rocher qu’il occupe aujourd’hui.

Voici une hstoire bien étrange sur ce village. Au sud du village, à proximité de la chapelle Saint André située sur le terrain militaire de Canjuers se trouve une grotte dans les clues de la Bruyère. Une légende persistante, colportée encore aujourd’hui, relate l’existence de gnomes vivant dans cette grotte. D’après la légende, on pouvait y entendre certains soirs, les voix des « gnomides » -êtres à forme humaine rampants- et qui essayaient d’entraîner les visiteurs avec leur complainte, dans la rivière souterraine. Il y quelques années, et malgré la création du camp militaire,  la grotte fut fermée par une grille.

Autre étrangeté de Comps, la bâtisse sous l’Eglise paroissiale présente la légende d’être hantée. Cette grande maison située sous l’église n’a jamais été habitée continuellement. Tous les propriétaires l’ont en effet rapidement revendue sans en donner de raison valable.

Autre particularité liée à ce village: la famille BAIN. La famille Bain est une famille d’aubergistes de renom, qui a le privilège d’être notifiée dans le Guinness des records pour détenir la même entreprise, l’Auberge BAIN  depuis 1727 !

 La région est également un fief Templier. Puissance temporelle et spirituelle, l’ordre des Templiers a fortement marqué le territoire du Var qui détient une position stratégique. « La Sainte Milice » veut soustraire l’Espagne à l’influence de l’Islam et imposer l’autorité de la chrétienté sur l’Occident. A la fin du XIIIème siècle, l’ordre est devenu l’un des plus grands propriétaires fonciers de la région à l’égal de l’ordre de Citeaux (Cisterciens du Thoronet). Les templiers exploitent les forêts, cultivent céréales, fruits et légumes, vignes et oliviers. Ils bénéficient de la protection des comtes catalans, qu’ils aident dans leur lutte contre les Maures. 4 grandes commanderies dominent le pays varois Villecroze-le-Ruou, Hyères-Toulon, Régusse, Bras et deviennent vite puissantes. Leur indépendance (les Templiers ne relèvent que du Pape), et l’étendue de leurs richesses, suscitent rapidement jalousies et conflits avec l’Eglise, les seigneurs féodaux, les communes. En 1308 Charles II d’Anjou fait les chevaliers du Temple dans l’Occitanie. Seuls quelques chevaliers réussissent à s’enfuir vers le Verdon, grâce à la complicité de certains évêques. La majorité de leurs possessions est attribuée à l’ordre des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem, futur ordre de Malte. De nombreux spécialistes sont persuadés que le trésor fantasmé des Templiers se trouverait dans la région du Verdon. De nombreuses traces passées et monuments jalonnent ce territoire naturellement enclavé. Sur la route franchit le Jabron au pont des Trois évêchés. À gauche sur l’ancienne voie romaine se trouve une inscription en grec probablement gravée par les Templiers. Quelques mythes templiers parsèment les alentours. La chapelle Saint-Thyrse est une chapelle romane. Elle servait d’église paroissiale à la communauté de Robion et est restaurée en 1703. Elle perd son statut avec le transfert de la paroisse à l’église Notre-Dame, située au village quelques kilomètres plus haut, en 1748. Elle est restaurée en 1942 et fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le 12 avril 1944. Étant la chapelle du cimetière de Robion, elle est encore utilisée. De plan rectangulaire, avec un clocher-tour, elle est rattachée au premier art roman (XIe et XIIe siècles dans la région). La présence d’une croix de Malte gravée sur la baie du chevet explicite d’appartenance de la chapelle à l’ordre du Temple, ces éléments sont retranscrits par les auteurs de l’Atlas historique de la Provence [- Raymond Collier, La Haute-Provence monumentale et artistique, 1986. – Joseph-Antoine Durbec, Templiers et Hospitaliers en Provence et dans les Alpes-Maritimes, 2001].
L’intérieur de la chapelle est très rudimentaire, pauvre et rustique ; quoi qu’il en soit, si la curiosité vous pousse à aller la voir vous ne serez pas déçu, certes elle ne contient pas de tableaux, statues dorées, troncs à piller mais, elle est chargée, une ambiance étrange y règne.

Saint Thyrse intérieur

Saint Thyrse intérieur (Photogrpahie : F. V., avril 2010).

La légende, voir l’histoire dit qu’un souterrain la relierait à d’autres chapelles Templières du site et même qu’un trésor, pourrait y être caché non loin mais son premier « trésor » est l’histoire qui semble l’occuper. Avec un peu d’attention il est nécessaire d’observer plusieurs signes que j’ai découverts au fur à mesure dans cette chapelle, à l’intérieur et à l’extérieur. A l’intérieur, sur les parois, des symboles maçonniques primitifs y sont gravées: bandeaux de dents d’engrenage superposés et de motifs géométriques (petits arcs, festons en relief, frettes crénelées, rosace, marques de tâcherons …). A l’extérieur, l’arc surmontant l’étroite baie d’axe est encore partiellement gravé d’une croix pattée inscrite dans un disque. Les consoles situées dans les panneaux du clocher sont ornées de motifs géométriques, de feuillages stylisés, d’un masque (du côté ouest au second étage).

Croix de Malte gravée en haut de l’arc

Croix de Malte gravée en haut de l’arc. – Cette double ouverture étroite et archée possède une particularité : elle est exactement dans l’axe formé par la lumière du soleil au crépuscule du jour du solstice d’été, le 21 juin. C’est-à-dire qu’au soir du solstice d’été, au coucher du Soleil, un faisceau de lumière traverse la nef de la chapelle dans sa longueur, au-dessus de l’autel, grâce à ces ouvertures étroites. (Photographie : Chapelle Saint Thyrse extérieur – coté est, avril 2010, F. V.).

Certaines sociétés initiatiques sont nées après la disparition de l’Ordre du Temple. Aujourd’hui, la chapelle Saint Thyrse est un lieu bien énigmatique dans lequel se perpétue des rites cultuels sociétaux archaïques, anciens et très difficilement dévoilés.

A quelques kilomètres, sur le flanc de la Montagne de Robion, la Chapelle Saint – Trophime est totalement encastrée dans une cavité de la falaise à 1300 mètres d’altitude, la vue y est splendide. Elle est visible depuis Saint-Thyrse. Cette chapelle est très difficilement accessible (2 heures de marche et un peu d’escalade), elle aussi dénommée la chapelle des lépreux car la légende prétend que cette chapelle était destiné à accueillir les lépreux des alentours. En effet, les fondations d’un ancien système de pont-levis permettait alors d’en contrôler l’accès.

Le Verdon« Rien de plus romantique que le mélange de ces rochers et de ces abîmes, de ces eaux vertes et de ces ombres pourpres, de ce ciel semblable à la mer homérique et de ce vent qui parle avec la voix des dieux morts. » (Jean Giono, Les Gorges du Verdon, 1959).

La commune de Castellane est une cité très ancienne implantée en amont des Gorges du Verdon. La ville est située à 724 mètres d’altitude. Le Roc, ou Roc Notre-Dame domine la ville de ses 184 m de haut. C’est le site qu’elle occupait au Haut Moyen Âge, et un site classé. Castellane présente un peuplement très ancien. Son territoire est d’abord fréquenté par des nomades au Néolithique (traces les plus anciennes : 6000 ans av. J.-C.). Une grotte ornée d’art pariétal se trouve également sur la commune; des tombes de l’âge du bronze ont été retrouvées dans une grotte de Castillon. Des tribus ligures occupent le territoire. Les Suetrii créent ensuite un oppidum appelé Ducelia, à proximité du Roc. Ils exploitent les nombreuses sources salées qui se trouvent à proximité et en revendent le sel. Après la conquête romaine, des habitations s’établissent dans la plaine, et la ville est appelée Civitas Saliniensum (la cité des marchands de sel). Elle est rattachée à la province romaine des Alpes-Maritimes et prend son essor. Plusieurs voies romaines partent ou passent par la ville. Les habitants de la cité s’installent tout d’abord sur le bord du Verdon pour y exploiter les sources salées encore visibles aujourd’hui. Un évêché y est fondé au Ve siècle : il est transféré à Senez avant la fin du IXème siècle et y reste jusqu’à sa suppression à la Révolution française, malgré toutes les tentatives de le faire revenir à Castellane. Pour se protéger des invasions, l’habitat se déplace au sommet du Roc qui domine la vallée du Verdon, puis descend un peu à flanc de montagne sur les terrasses bordant le Roc. Certains vestiges de ce troisième site de Castellane sont encore visibles. Au début du IXe siècle, tout le terroir environnant n’était peuplé que de 84 habitants. Pour des questions pratiques, les habitants s’installent ensuite au pied du Roc, dans le fond de la vallée. C’est en 852 que Boniface de Castellane remporte une victoire sur les Maures, ce qui lui permet de constituer une vaste baronnie de 46 villages. En 1189, le baron de Castellane Boniface III est attaqué par son suzerain Alphonse Ier de Provence auquel il refusait l’hommage. Une autre guerre éclate entre le baron de Castellane et son comte en 1227. En 1262, c’est Charles Ier d’Anjou qui soumet Boniface VI de Castellane : il y installe le chef-lieu d’une nouvelle viguerie. La Peste noire atteint Castellane en 1348, et est suivie d’une crue dévastatrice du Verdon. En 1390, Raymond de Turenne ravage le terroir environnant, sans réussir à prendre la ville. La Provence est rattachée à la Couronne de France en 1483, et Louis XI fait raser le château. En 1486, un consulat est conféré à Castellane par le roi Charles VIII de France, qui peut s’administrer elle-même. Les Impériaux de Charles Quint pillent la ville en 1536. Des troubles religieux éclatent dès 1559, Brun de Caille ayant converti les Castellanais. Paulon de Mauvans, capitaine protestant, pille la ville à l’été 1560, puis s’y installe après un armistice avec le gouverneur de Provence, le comte de Tende. La ville est attaquée par les protestants le 4 octobre 1574, mais ils en sont chassés par les habitants.

« Dans les montagnes de Castellane se trouvent d’ailleurs les derniers jansénistes de l’époque moderne, non seulement des jansénistes, mais presque tous les protestants – je veux dire presque tous ceux qui ont protesté contre quelque chose : d’abord les protestant véritables, les protestants protestants, les protestants contre les situations politiques, les protestants contre les situation philosophiques, enfin ceux qui protestent à quelque époque que ce soit : ils se sont réfugiés et ont trouvé leur viedans ces vallons éloignés,  dans ces vallons retirés. Ce mélange de hors la loi, qui se sont de cette façon-là, succédé dans les familles a créé une race de gens solides, presque muets, peu communicatifs, mais qui, une fois gagnés par les sentiments de sympathie qu’on peut leur inspiré, deviennent des personnages extraordinaire et qu’on aime d’une façon définitive et pour toujours. Là se trouve encore, même maintenant, des traditions patriarcales semblables à celles qu’on peut encore admirer dans Virgile ou dans les grandes légendes ; nous avons encore dans la famille l’autorité incontestée et incontestable du père ; l’autorité en second, légèrement au-dessus du père, est détenue par la mère qui se tient toujours dans une modestie non dénuée malgré tout de puissance, et les enfants obéissent d’une façon très parfaite à l’organisation patriarcale. On entre dans une famille qui vit presque séparée du monde moderne, sans presque prêter le flanc aux besoins que la société nous a donné presque à tous » (Jean Giono, Quand on vient du Nord …, 1961).

Le 30 janvier 1586, le baron d’Allemagne et le duc de Lesdiguières tentent de surprendre la ville. L’attaque est repoussée, le baron d’Allemagne est blessé d’une balle dans le dos, ce qui provoque le repli des assaillants. Ce siège est depuis célébré chaque année le dernier week-end de janvier, à travers la cérémonie des Pétardiers (sapeurs artificiers). L’attaque est reconstituée, et notamment l’épisode où Judith Andrau, la femme de Barrême, tua le capitaine des pétardiers, Jean Motte, en lui versant un chaudron de poix bouillante du haut de la porte de l’Annonciade, réputée point faible du village. Une nouvelle peste frappe la ville en 1630. En 1639, son rôle administratif est renforcé et confirmé par l’installation d’une sénéchaussée, qui remplace la cour royale.

Ce village présente de nombreuses histoires amusantes. Parmi celles-ci, celle de son évêque janséniste. L’évêque janséniste Jean Soanen tente de rendre les célébrations du Saint-Sacrement, de la Saint-Jean et de la Saint-Éloi plus mesurées et moins débridées, la jeunesse du bourg ayant pour coutume de les fêter avec tambour, musique et coups de feu. Les jeunes refusent, résistent, font encore plus de bruit, et même se révoltent, empêchant la procession de l’octave du Saint-Sacrement de sortir de l’église, le 22 juin 1710.

Les Austro-Sardes occupent brièvement la ville en 1746, lors de la guerre de Succession d’Autriche. En 1789, la nouvelle de la prise de la Bastille est accueillie favorablement, cet événement annonçant la fin de l’arbitraire royal et, peut-être, des changements plus profonds dans l’organisation de la France. Immédiatement après l’arrivée de la nouvelle, un grand phénomène de peur collective s’empare de la France. Des rumeurs de troupes de plusieurs milliers d’hommes en armes, soldés par les aristocrates et dévastant tout sur leur passage, se propagent à grande vitesse et provoquent la panique. On sonne le tocsin, on s’arme, on envoie des messages aux villages voisins pour se renseigner, ce qui propage la peur. Les solidarités se créent ainsi ; les milices formées à cette occasion constituent la base des bataillons de la Garde nationales. Cette Grande Peur, venant de Digne et appartenant au courant de la « peur du Mâconnais », atteint Castellane et sa région le 31 juillet 1789 avant de se propager vers la vallée du Var. La société patriotique (Société des Amis de la Constitution) est enregistrée le 8 septembre 1791, disparaît, puis se reconstitue le 6 mai suivant, lors de la tournée des administrateurs départementaux. Elle prend alors pour nom Société des Amis de la Liberté, Égalité, Paix et Loix. Masséna s’y inscrit et les femmes fondent un club distinct des hommes, avant que les deux ne fusionnent. Elle compte jusqu’à 293 adhérents, soit 40 à 70 % de la population masculine, et s’affilie au club des Jacobins de Paris (la seule du district dans ce cas), puis à celui des Jacobins de Marseille le 17 juin 1792. Les discussions, qui ont lieu majoritairement en provençal, sont animées et dégénèrent parfois en pugilat, par exemple le 29 juin 1792 à propos d’une éventuelle descente des Marseillais. Le 5 frimaire an III, le représentant en mission Gauthier épure la société.

En 1800, une sous-préfecture est créée à Castellane.  Avec environ 1 600 habitants, Castellane a la particularité d’être la sous-préfecture la moins peuplée de France. Le 10 septembre 1926, la sous-préfecture est supprimée, dans le cadre du plan d’économies de Poincaré, puis est rétablie le 1er juin 1942.  Castellane est un bourg agréable qui mérite une halte ou un déjeuner. Ses rues sont charmantes et animées durant la période estivale.  Le Roc qui domine la ville, s’élevant à 930 mètres (soit plus de 200 m au-dessus du Verdon), est un site naturel classé depuis 1933. Le Roc est une singularité naturelle qui se détache dans la vallée du Verdon, et qui est visible de loin ; il est également classé en raison de son histoire, puisque la cité de Castellane s’y est implanté au Haut Moyen Âge. La chapelle Notre-Dame du Roc domine la ville, son mobilier contient de nombreuses œuvres classées (ex-voto, tableaux, statues …).

Castellane marque la première rencontre de l’itinéraire avec le Verdon, ce torrent qui jaillit des Alpes du sud dans le massif des Trois Evêchés, à près de 3000 mètres d’altitude, est le plus beaux et le impérial des cours d’eaux provençaux.

« Il se déroule d’abord le plus simplement du monde, comme une couleuvre. Dès ses premiers muscles, il fait apparaitre tout de suite sa démarche héroïque.
C’est un guerrier. Il saute à grand bonds sur les escaliers des Alpes. Il tranche les montagnes, il s’ouvre un chemin dans le roc.
C’est un roi souterrain. Il s’enfonce dans des ténèbres vertes qui épouvantent.
C’est un cheval au galop. Il traverse en bondissant les paysages de Dante.
Enfin, dans le plat pays, il rencontre la Durance, et il s’endort, embarrassé dans les joncs. » (Jean Giono, 1968).

Le vert profond des eaux du Verdon est probablement son nom, formé à partir du latin viridum, « lieu verdoyant ». Il parcourt environ 180 km dans les Alpes de Haute Provence et le Var. Pendant la période du Trias, la Provence s’affaisse et la mer la recouvre, déposant d’épaisses couches de calcaires divers. Pendant la période Jurassique, la Provence est recouverte d’une mer chaude et peu profonde, facilitant la multiplication des coraux. Au Crétacé, la Basse Provence se rehausse et la mer atteint l’emplacement actuel des Alpes. L’ère Tertiaire voit l’édification des Alpes. La fracture des calcaires jurassiques façonne les reliefs et les vallées. C’est à cette époque que le Verdon trace son cours. Au Quaternaire, les glaciations transforment les cours d’eau et les lacs en redoutables fleuves de glace, qui modèlent les reliefs en taillant et striant le paysage. À la fin de ces glaciations, les eaux des rivières continuent leur érosion et notamment, le Verdon, en creusant son lit dans les sédiments calcaires coralliens accumulés au secondaire. Son parcours le plus intéressant se trouve entre Castellane et le Pont du Galetas, sur le lac de Sainte-Croix. Ce lac était il y a quelques dizaines d’années la grande plaine des Salles-sur-Verdon, avant la mise en eaux du lac artificiel créé par l’édification du barrage de Sainte-Croix. Lors de la montée des eaux en 1973, le vieux village des Salles a été évacué (de force), détruit et noyé. Son église a été dynamitée, tout comme le village, qui est reconstruit plus haut et plus moderne, au grand dam de ses habitants. C’est maintenant un des plus jeunes villages de France. Les gorges du Verdon constituent la frontière entre les départements du Var au sud et les Alpes-de-Haute-Provence. Le relief particulier des gorges en fait un écosystème à part, où vivent des espèces rares (telles que des fougères découverte au XXème siècle, ou des reptiles dépigmentés …).

Considérant la particularité toponymique du département du Var, plusieurs projets de changement de nom du département furent proposés, sans résultats. Parmi ceux-ci figurait celui de rebaptiser le Var département du Verdon, du nom du cour d’eau limitrophe au département. Mais pour l’heure que le département conserve le nom sous lequel il est bien connu, notamment à l’extérieur du territoire.

Les gorges du Verdon n’attirent l’attention des voyageurs que tardivement. Les premières descriptions imprimées datent du XIXème siècle, mais restent rares. Malgré le développement de la sensibilité aux beautés naturelles et la vogue du romantisme, ils ne remarquent qu’une coupure et ne s’attardent pas à la description d’un site accessible uniquement par des sentiers muletiers (aucun axe routier n’existait alors). Les gorges ne deviennent connues qu’avec la description qu’en fait Élisée Reclus en 1879, et la diffusion des guides touristiques (guides Joanne notamment à partir de 1877, Guide touristique de la Provence, guide Baedeker) à la Belle Époque. Les gorges sont, pour la première fois, cartographiées par les Cassini (années 1770)  et les ingénieurs géographes du roi, en 1778. C’est Édouard-Alfred Martel qui dirige la première expédition à descendre de bout en bout le canyon du Verdon. Le tourisme se développe lentement dans les années 1880-1900: les sentiers sont dangereux, les infrastructures (hôtels, restaurants, routes, sentiers) rares ou inexistantes. De plus, le principal moyen de transport de l’époque, le chemin de fer, s’arrête à Draguignan, ce qui obligeait à traverser des dizaines de kilomètres sans routes pour voir les gorges. « En pleine Provence, entre Castellane et Draguignan, le grand canyon du Verdon est une des merveilles naturelles de la France, et de la terre. Ces fonds étaient encore inexplorés au début du XXe siècle. Malgré plusieurs tentatives, les «abîmes du Verdon» (ainsi les appelle-t-on dans le pays) n’étaient sommairement connues que les coupeurs de buis de la Palud et d’Aiguines qui, à l’aide de cordes accrochées aux falaises, vont quérir des souches ou racines de cet arbuste pour la fabrication de jeux de boules. J’ai réussi à effectuer la première descente totale du torrent dans cette gorge, du 11 au14 août 1905. L’entreprise faisait partie d’une mission spéciale, qui m’avait été confié par M. Ruau, ministre de l’agriculture. Au prix de sérieuses difficultés, nous découvrions alors que ce grand canyon du Verdon dépasse de beaucoup en magnificence ceux du Tarn et de l’Ardèche. ». (Extrait de « La France ignorée – Sud-Est de la France » ; récit de la première exploration du Verdon par Édouard-Alfred Martel). Édouard-Alfred Martel (1859 – 1938) est considéré comme le fondateur de la spéléologie moderne. Né à Pontoise, en Seine-et-Oise, enfant d’une famille de juristes, il fait ses études au lycée Condorcet à Paris. Très tôt, il devient passionné de géographie et de sciences naturelles et il remporte en 1877 le premier prix de géographie au concours général. Il dirigea des explorations en Dalmatie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, dans le Kentucky. Il obtient le Grand prix des sciences physiques décerné par L’Académie des sciences en 1907. Il sera Officier de la Légion d’honneur en 1909 (pour services rendus dans l’étude des questions d’hygiène militaire, épidémies de fièvre typhoïde) ; Commandeur de la Légion d’honneur en 1927.

Dans les années 1890 (et jusqu’aux années 1920), des projets de retenues rendant le canyon accessible voient le jour. Le premier aménagement date de 1906 : le Touring Club de France (TCF) trace un sentier qui permet de descendre dans les gorges. Le premier essor touristique des gorges date de la fin des années 1920 et des années 1930, sous l’impulsion du TCF : campagne de presse à partir de 1928, voyages de découverte, reportage diffusé au cinéma, visite de journalistes britanniques. Cette promotion est complétée par de nouveaux travaux en 1929 et 1930 : amélioration de la viabilité routière, à l’initiative et en partie sur les fonds du TCF, aménagement de belvédères (dont le Point Sublime est le plus remarquable), incitation aux compagnies de transport local pour multiplier les dessertes, aménagement de nouveaux sentiers inaugurés en juin 1930, enfin création du refuge de Malines en 1936. Ces efforts attirent quelques milliers de touristes chaque année.

En 1953, les gorges du Verdon sont choisis pour le tournage du film « Le salaire de la peur« , avec Yves Montand, qui met en scène un convoi  de 400 kilos d’explosifs par des routes sont presque impraticables.

Le Salaire de la peur (1953), affiche du film.

Le Salaire de la peur (1953), affiche du film.

 Le site est devenu un site naturel protégé depuis le 7 mai 1990. Les Gorges du Verdon sont réputées pour former le plus beau canyon d’Europe, le deuxième plus grand du monde (après celui du Colorado) et attirent de nombreux touristes, surtout pendant la période estivale. C’est surtout Isidore Blanc qui fut l’initiateur du tourisme local en aménageant les sentiers existants pour les rendre praticables aux randonneurs. L’itinéraire entre Castellane et Moustier Sainte Marie emprunte la rive droite du Verdon et la fabuleuse «route des Crêtes». La visite du Verdon par le mode routier demeure cependant très superficielle, une vague senteur de parfum sans en saisir son essence. En outre une escapade dans le Verdon, doit être prudente et avertie. Malgré les apparences, le Verdon est un lieu sauvage, le climat y est rude et les sentiers peuvent être dangereux.

Lac de Sainte Croix

Lac de Sainte Croix (Photo : F. V., décembre 2011).

Blotti contre un escarpement rocheux, Moustiers Sainte-Marie est souvent comparé à une crèche avec son étoile suspendue dans le vide, et fait partie des plus beaux villages de France, siège du Parc naturel régional du Verdon. Le nom du village, tel qu’il apparaît pour la première fois dans les textes (ecclesia Sancte Marie in Monasterio) en 1009, désigne le monastère fondé au Veme siècle. Il devient Moustiers-Sainte-Marie en 1848.  La petite ville de Moustiers est fondée au Ve s. par une colonie de moines. Un chapitre de chanoines y est fondé en 1052, et perdure jusqu’au don de toutes les églises de Moustiers et de la vallée à l’abbaye de Lérins, en 1097. Le monastère se partageait les droits seigneuriaux avec l’abbaye de Lérins aux XIe et XIIe siècle, avant que le bourg rejoigne le domaine des comtes de Provence. Le lieu-dit Ourbès était déjà occupé à la période carolingienne : c’est la villa Orbesio, fondée au viiie siècle. Située sur un plateau à 1000 m d’altitude, elle pouvait être à la tête d’un vaste domaine. Le prieuré Saint-Jean, peut être cité en 909 parmi les biens de l’abbaye de Cluny, appartient ensuite à l’abbaye Saint-Victor de Marseille, qui le cède à l’abbaye de Lérins au début du XIe siècle, qui le lui retourne ensuite. Les autres églises, Saint-Saturnin, Saint-Michel, relèvent de Lérins. Le comte de Provence accorde un consulat aux habitants au XIIIe siècle, et installe le siège d’une baillie à Moustiers en 1300. La ville est le siège d’une viguerie et d’une foire jusqu’à la Révolution. Le bourg connaît une grande renommée aux XVIIe et XVIIIe siècles grâce à ses faïences.  Selon la tradition, un religieux, venu de Faênza (Italie), aurait appris à un potier de la ville le secret du bel émail blanc laiteux qui devait assurer avec le bleu dit «de Moustiers » la réputation des faïences locales. À la fin du XVIIIe s. douze ateliers fonctionnaient. Puis les fours s’éteignirent un à un, le dernier en 1873. Marcel Provence entreprit, en 1925, de faire renaître à Moustiers l’art de la faïence. Il construisit un four et, avec le concours d’artistes décorateurs et d’artisans qualifiés, en fit sortir une production originale, inspirée de la flore et des insectes du pays. Moustiers est un des rares bourgs de Haute-Provence à accueillir une loge maçonnique avant la Révolution, nommée Les Indissolubles et affiliée à la Grande loge provinciale en 1788. La nouvelle de la prise de la Bastille est accueillie favorablement, cet événement annonçant la fin de l’arbitraire royal et, peut-être, des changements plus profonds dans l’organisation de la France. Immédiatement après l’arrivée de la nouvelle, un grand phénomène de peur collective s’empare de la France. Des rumeurs de troupes de plusieurs milliers d’hommes en armes, soldés par les aristocrates et dévastant tout sur leur passage, se propagent à grande vitesse et provoquent la panique. On sonne le tocsin, on s’arme, on envoie des messages aux villages voisins pour se renseigner, ce qui propage la peur. Les solidarités se créent ainsi ; les milices formées à cette occasion constituent la base des bataillons de la Garde nationale. Cette Grande Peur, venant de Digne et appartenant au courant de la « peur du Mâconnais », atteint Moustiers et sa région le 31 juillet 1789 avant de s’éteindre. Le prieuré Saint-Jean, qui appartenait à l’abbaye Saint-Victor, est vendu comme bien national. Une société patriotique y est rapidement créée : elle fait partie des 21 premières créées dans les Basses-Alpes, avant juin 1792. Le 5 frimaire an III, le représentant en mission Gauthier épure la société.

L’étoile de Moustiers est accrochée à une chaîne, tendue entre deux montagnes, à plusieurs dizaines de mètres au-dessus de la chapelle Notre dame de Beauvoir. Selon la légende rapportée par Frédéric Mistral, il s’agit d’un ex-voto : le chevalier de Blacas, qui fut fait prisonnier en croisade par les Mamelouks à Damiette, fit la promesse de consacrer un monument à la Vierge s’il revenait un jour en son fief. Revenu sain et sauf, il a tenu sa promesse et a fait suspendre une étoile à seize branches, emblème de sa famille. Une autre légende raconte que deux amoureux du village, issus de deux familles ennemies qui leur interdisaient de s’aimer, se sont suicidés ici, et que les deux familles ont ensuite fait suspendre cette chaîne. La chaîne pèse environ 400 kg et l’étoile a un diamètre de 80 cm. L’étoile que l’on peut admirer aujourd’hui n’est pas l’étoile originale mais celle qui a été restaurée en 1882 ; en effet elle n’a maintenant que cinq branches. Il y a une dizaine d’années, l’étoile s’est décrochée et a été retrouvée au fond du ravin. Les habitants se sont cotisés et un mois après elle a été redorée et remise en place.

Les faiences de Moustiers font la fierté du bourg Clérissy, venant sans doute d’Italie, sont installés vers 1550, comme « potiers de terre». Pierre Ier est qualifié de «maître faïencier» en 1679. Son fils Antoine est associé à partir de 1702, il est le seul faïencier jusqu’en 1715. Son fils Pierre II, émancipé, devient à son tour associé en 1732, puis dirige seul à partir de 1736. Il vendra à Joseph Fouque. La production est une faïence grand feu, généralement en camaïeu bleu et ornementale. On trouve trois décors principaux :
– scènes de chasse reproduisant les gravures d’Antonio Tempesta (graveur florentin de la Renaissance italienne).
– décor « à la Bérain », inspiré des ornemanistes de Louis XIV, comme Jean Bérain .
– pièces armoriées encadrées d’ornements.
L’art de la céramique a considérablement évolué à Moustiers depuis le Moyen Âge. On ne fabriquait alors que des objets en terre vernissée, dans les tons naturels de vert et brun. On doit l’essor de cet art à Pierre Clérissy, à qui un moine italien de passage au Monastère de la Communauté de Lérins confia le secret de l’émail blanc (faïence stannifère) en 1668. Louis XIV ayant ordonné que la vaisselle d’or et d’argent soit fondue pour renflouer le trésor royal, la faïence de Moustiers acquit dans les cours d’Europe une notoriété de premier ordre. La mode de la porcelaine et de la faïence anglaise met un terme à deux siècles d’activité ininterrompue. En 1927, Marcel Provence rallume un four du village dans le but de redorer son image de grande cité de la faïence dans le monde entier. On compte aujourd’hui une vingtaine d’ateliers et un musée qui lui sont dédiés.

Moustiers Sainte Marie surplombe le Lac de Sainte Croix. Le projet consistant à noyer la vallée des Salles pour réaliser un lac ne date pas d’hier. En 1908, c’est à dos d’âne que Georges Clemenceau, alors Président du Conseil, entreprit une randonnée sur tout le cours du Verdon entre Fontaine L’Evêque et le lac d’Allos : on envisageait déjà à l’époque l’aménagement du Verdon, et la construction de barrages à certains endroits stratégiques de son cours. Le projet fut mis en sommeil à cause des aléas de l’Histoire, sans être totalement abandonné. Entre les deux guerres, c’est la Société Schneider qui était chargé de la construction du barrage, lequel resta à l’état de projet. Les événements se bousculèrent à partir de 1962. Le projet retenu consistait à réaliser un « grand lac » jusqu’à la côte 500. Celui-ci devait noyer, outre Les Salles-sur-Verdon situé au fond de la vallée, le village de Bauduen, alors que Sainte-Croix-du-Verdon devenait inhabitable. Du fait de la présence de la résurgence vauclusienne de Fontaine L’Evêque un risque existait de voir ce « grand lac » se vidanger par un effet de siphon. De plus, la détermination des expropriés des trois villages les plus concernés par le projet ne faiblissait pas. Fin 1968, la côte retenue pour le futur lac fut abaissée à 482. Les villages de Sainte-Croix et Bauduen étaient sauvés, Les-Salles-sur-Verdon était le seul village condamné par la mise en eau du futur lac. La première mise en eau du barrage eu lieu en août 1973, et la mise en eau définitive le 15 novembre 1973.

« Un peu à l’écart du Verdon, c’était un beau village avec son clocher couvert de tuiles, qui dépassait d’une hauteur de cloche les ormes et les micocouliers »  (Jean Giono). En Février 1974,  Le village n’est plus qu’un ensemble informe où il est difficile de reconnaître l’ancien village familier. Le lac est au pied du village. L’eau monte inexorablement. L’adjoint au maire, M. Signoret, qui n’a plus chez lui ni eau ni électricité, s’apercevra un matin que le rez-de-chaussée de sa maison a été envahi par les eaux durant la nuit.  A 4 km au nord des Salles, à la sortie des Gorges du Verdon, le pont « romain » d’Aiguines. Cet endroit disparu est pourtant immortel. Peut-être avez-vous vu le film « Jeux Interdits«  de René Clément. Dans les premières scènes de ce film, Brigitte Fossey se précipite sur le pont sous une pluie de balles pour rattraper son chien. Un film de René Clément avec Brigitte Fossey et Georges Poujouly, dont les premières minutes ont été tournées en 1951 au Pont d’Aiguines. Nombreux sont les habitants des Salles-sur-Verdon qui ont été figurants lors du tournage de ces quelques scènes ; le cheval qui titube dans les premières minutes du film, et qui traverse le pont en tirant une charrette dont il manque une roue, c’était celui de Louis Brunias ! Celui-ci (plus connu sous le surnom de « Miaou ») était dissimulé sous une couverture dans la charrette. Lion d’Or du Festival de Venise en 1952, le film « Jeux Interdits » et son thème musical, grâce au guitariste Narciso Yepes, resteront à jamais dans les mémoires pour évoquer ce lieu disparu.

Jeux interdits (1952) - affiche du film

Jeux interdits (1952) – affiche du film

Aups est qualifiée de « capitale du Haut-Var » et de « capitale de la truffe ». Aups («Alpes» en occitan) est située aux portes du Verdon sur les premiers contreforts des Alpes, à 500 mètres d’altitude. Elle est au pied de la montagne des Espiguières (880 m), rempart de tuf percé de nombreuses grottes et avens dont Sainte-Magdeleine et Plérimond, et d’un plateau fertile arrosé par le torrent de la Grave et par de nombreuses sources qui coulent dans les fontaines de la ville. À distance de 60 km de la mer et à 80 km des stations de ski, la ville vit dans un climat très sain, de style méditerranéen. La végétation est essentiellement composée de pins d’Alep, de chênes verts et pubescents pour la trufficulture et d’oliviers en plaine (forêt des Uchanes, de la vallée de l’Espiguière, de Pelenq…). À partir de 700 mètres d’altitude, sur les montagnes alpines au nord de la commune, les pins sylvestres, garrigues, buis et chênes kermès prospèrent. Ces montagnes sont notamment les Cuguyons (995 m) inscrits dans le blason du village, les montagnes des chapelles Notre-Dame de Liesse (985 m) et Saint-Priest (1 077 m). La commune est intégrée dans le parc naturel régional du Verdon depuis 2000. Le village s’est autrefois appelé oppidum de Alpibus puis castrum de Alpibus, castrum de Almis, puis Alps et enfin Aups. Il a été occupé par les Oxybiens pendant l’époque romaine, à l’emplacement du plateau de Saint-Marc (sur la Via Aurelia allant de Fréjus (Forum Julii) à Riez (Forum Reii). Jules César y est passé pour conquérir la Gaule et il aurait dit « je préfère être premier à Aups qu’être second à Rome ». Tout autour du village, on a retrouvé des traces de cette présence romaine, comme un ancien hôpital et des bornes milliaires notamment autour du Plan de Canjuers dont l’appellation vient de Campus Julii ou camp de Jules César. Conquis par les Sarrasins au Xe siècle avant la victoire de la bataille de Tourtour. Le roi René érige Aups en baillie indépendante, en détachant la communauté de la baillie de Barjols dont elle faisait partie. Un an plus tard, elle retombe dans l’autorité de cette dernière, jusqu’à ce que François Ier décide d’en faire une circonscription indépendante, par lettres données en 1533. L’ancien chapitre noble de Valmoissine est transféré à Aups par le pape Alexandre IV en 1499. Les huguenots du baron d’Allemagne-en-Provence attaquent le village le 16 octobre 1574 et massacrent 30 Aulpins. Une « vierge du massacre » a été érigée sur le lieu de la torture situé dans la rue de l’Horloge. La ville a aussi subi des tueries pendant la Révolution française. La viguerie d’Aups a été dominée depuis l’An Mil par la famille ducale de Blacas d’Aulps, grande famille historique de la région. Cependant, suite à un procès débuté en 1346 et qui durera près de quatre siècles entre les ducs de Blacas et le village d’Aups, la ville obtient en 1712 de ne dépendre juridiquement que du roi de France. On fondit alors une cloche, encore visible aujourd’hui dans le campanile de la tour de l’Horloge. Cette cloche porte l’inscription «Je suis la joie de tout le monde » pour garder en mémoire ces jours de liesse qui marquèrent cette victoire. En 1804, Aups annexa la commune de Fabrègues, alors peuplée de seulement 22 habitants vivant dans le château de Fabrègues et ses maisons voisines. Aups fut le centre de l’insurrection varoise républicaine contre le coup d’État de Napoléon III en 1851, d’où provient son surnom de « Centre du Var Rouge ». Près de 6 000 Républicains armés des environs s’y rassemblent entre le 8 et le 10 décembre. Toute la ville participe : ainsi, l’hôpital est transformé en atelier où des blouses sont cousues par de jeunes couturières volontaires pour les hommes en armes. La colonne de répression commandée par le colonel Pastoureau est arrivée à Aups le 10 décembre. La bataille se conclut par une victoire du 50e de ligne, qui a un mort, contre cinquante dans les rangs des insurgés. Un obélisque a été érigé en 1881 en honneur des nombreux républicains morts sur la place Louis Martin Bidouré, héros de cette rébellion qui fut exécuté deux fois (Il est arrêté, porteur d’un message sur la route de Tourtour. On le fusille sur place, mais mal. Revenu à lui, il se traîne chez des paysans. Dénoncé il est capturé de nouveau, on l’exécute, cette fois, avec plus d’attention que la première…) On trouve aussi un mausolée dans le cimetière de la commune. Le village est un haut-lieu de la résistance française durant la Seconde Guerre mondiale. De sanglants épisodes ont valu à la commune d’obtenir la Croix de Guerre avec palmes.

Vespa sur la place d’Aups

Vespa sur la place d’Aups (Photo : F. V., juillet 2012).

Aups est le Centre du Var Rouge, cette dénomination aujourd’hui bien étrangère aux aspirations politique actuelles du département, démontre pourtant un enracinement républicain profond dans l’Histoire du département. En réaction au coup d’Etat du 2 décembre 1851 mené par le président de la République, Louis Napoléon Bonaparte, et par lequel il s’empare du pouvoir, le Var et 26 autres départements du centre et du Midi se soulèvent au nom de la constitution de 1848 et pour sauver la République. Dans le Var, sitôt la nouvelle connue, le 3 décembre, des rassemblements ont lieu. A Toulon, les républicains se heurtent au dispositif militaire renforcé par le nouveau préfet Pastoureau, et les premières arrestations sont opérées. A Draguignan, la garnison garde la préfecture mais ne peut arrêter les républicains. Commencée dès le 4 au Luc, à Vidauban, à La Garde Freinet, à Cogolin, l’insurrection s’étend le 5 à presque toutes les communes de l’arrondissement de Brignoles, du sud de l’arrondissement de Draguignan et de l’est de celui de Toulon ainsi que dans quelques communes de l’arrondissement de Grasse. Des commissions municipales s’installent dans les mairies et désarment les gendarmes. Les insurgés réquisitionnent armes, poudres, vivres, contrôlent la circulation sur les routes et projettent de marcher sur Draguignan. A Toulon, l’armée constitue une colonne expéditionnaire menée par le colonel Trauers et le préfet Pastoureau. Dès le 5 au soir, l’insurrection est vaincue dans les arrondissements de Toulon et de Grasse. Au cours des 5 et 6 décembre, les insurgés venus de Cogolin, Grimaud, St-Tropez, La Garde Freinet, Brignoles et du Luc convergent vers Vidauban. Le 7, Duteil, chef de la colonne insurrectionnelle, renonce à prendre d’assaut Draguignan et décide de partir vers le nord afin d’opérer la jonction avec l’armée des Basses-Alpes. Le 8, la colonne, forte de plus de 3000 hommes atteint Aups. De son côté, après avoir traversé Le Luc et d’autres villages et rétabli les municipalités, la colonne de répression atteint Draguignan le 8 alors qu’une autre armée partie de Marseille reprend Brignoles. Le 10, Aups est repris. Parmi les insurgés, on compte des dizaines de tués. Les jours suivants, une véritable chasse à l’homme se met en place. La colonne militaire revient à Toulon le 13 avec de nombreux prisonniers enfermés au Fort Lamalgue. Dénonciations et arrestations se multiplient jusqu’à la fin décembre. Et, au total, dans le Var, 3147 insurgés dont 16 femmes sont condamnés à des peines diverses dont la transportation en Algérie et l’internement. Certains insurgés seront graciés par Louis Napoléon Bonaparte, proclamé Empereur en 1852. Ce mouvement insurrectionnel a été peu à peu réhabilité à partir de la IIIème République, et notamment avec la loi de réparation nationale aux victimes du coup d’Etat votée le 30 juillet 1881. Pendant la Seconde Guerre mondiale, des résistants du Var affirment même leur filiation avec les insurgés de 1851. Il est intéressant de noter que cette insurrection de 1851 est le fil conducteur de  » La Fortune des Rougon « , premier des 20 tomes des Rougon Macquart d’Emile Zola.

En 1848, le territoire du département du Var est beaucoup plus vaste qu’aujourd’hui : l’arrondissement de Grasse est varois et, aux portes de Nice, le fleuve Var fait frontière avec les terres de la Maison de Savoie.  Le grand port de Toulon vit au rythme de l’Arsenal et de la Marine nationale. Mais à l’Est d’Hyères, le littoral est presque vide d’habitants, Fréjus et Saint-Raphaël ne sont que de modestes cités. Par contre, le Var intérieur présente un tissu rural dense constellé de localités où artisans et ouvriers se mêlent aux travailleurs de la terre.  Soulignons que, dans les années qui avaient précédé la Seconde République, nombre de « sujets piémontais », autrement dit Niçois et Gavots, avaient fourni leurs bras à l’agriculture comme à l’industrie naissante des Bouches-du-Rhône et du Var.  Ce département du Var va se singulariser dès l’adoption par la jeune Seconde République du suffrage un peu vite baptisé universel (il n’était que masculin). Aux législatives du printemps 1848, les électeurs varois font, dans une grande confusion de candidats et de programmes, leur apprentissage de citoyens. Ils dispersent leurs voix que se disputent républicains de la veille ou du lendemain, conservateurs déguisés en modérés, mais aussi socialistes, voire communistes implantés dans des noyaux d’artisans et d’ouvriers. Rien de bien original par rapport aux autres départements méridionaux. La grande surprise vient de l’élection présidentielle de décembre 1848. Après avoir écrasé dans le sang, en juin 1848, la vague de revendications ouvrières, les républicains « modérés » au pouvoir avaient concocté une Constitution qui confiait le pouvoir exécutif, nouveauté absolue, à un Président omnipotent. On ne soulignera jamais assez combien cette néfaste constitution est la matrice de la nôtre, dont on mesure plus que jamais combien elle est grosse de dérive monarchiste.  Le Président, homme à poigne, dont les « modérés » espéraient la perpétuation de leur pouvoir, devait être le général Cavaignac, celui-là même qui avait noyé dans le sang l’insurrection ouvrière parisienne de juin 1848.  Mais on sait que ce candidat officiel fut balayé en décembre 1848 par l’aventurier politique Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de l’Empereur. Dans la nostalgie d’un Empire revisité, continuateur de la grande Révolution, la vague bonapartiste avait charrié l’immense foule des déçus de la République, et au premier chef les paysans durement imposés, et les ouvriers écrasés en juin.  Louis-Napoléon obtint la majorité absolue dans tous les départements, sauf quatre, qui votèrent Cavaignac : les Bouches-du-Rhône, le Finistère, le Morbihan… et le Var. Comment interpréter ce vote varois ? Rien à voir avec l’engagement décisif de l’Église dans les deux départements bretons. Certes, comme dans les Bouches-du-Rhône voisines, il fait prendre la mesure du poids des notables varois de tout poil, conservateurs ou « modérés », qui voyaient dans Cavaignac un rempart contre le péril rouge. Mais, au-delà d’une présence non négligeable des différents courants de l’Extrême Gauche, depuis longtemps dans l’espérance de la République, le vote varois témoigne aussi d’un républicanisme populaire bien ancré, propagé depuis des années notamment par la jeunesse étudiante des fils de petits notables, et par les instituteurs. Les élections de 1849 allaient rapidement révéler l’hétérogénéité de ce massif bloc « Cavaignac » départemental.  Alors que les « Bleus » modérés fondaient comme neige au soleil varois, le corps électoral se scindait violemment entre « Blancs » conservateurs et « Rouges » démocrates-socialistes. Malgré une répression administrative très dure initiée par le préfet Haussmann, (plus tard célèbre par son remodelage de Paris), les « Rouges » conserveront en 1850 et 1851 leur avantage électoral de 1849.  C’est cette rapide montée en puissance et cet enracinement maintenu des « Rouges » qui explique la levée en masse varoise contre le coup d’État du 2 décembre 1851.  Les « Rouges » varois ne sont pas un parti, au sens actuel du terme, mais un mouvement d’opinion dont la base est le groupe local : mise en communication « horizontale » des cercles locaux, rapports plus ou moins directs avec les leaders départementaux, à Draguignan et Toulon, et régionaux (Marseille).  On ne soulignera jamais assez le rôle du journal « rouge » départemental, Le Démocrate du Var, dans cette cohérence organisationnelle complexe et dans l’influence électorale démocrate-socialiste. Les autorités en étaient si bien convaincues qu’elles chercheront à le tuer, par les procès, les saisies, les amendes et les limitations de diffusion.  On ne soulignera non plus jamais assez l’importance décisive, dans cette conquête de l’opinion populaire, de la présence innombrable des militants, de leur parole et de leurs initiatives au plus près de la réalité populaire : sur les lieux de travail comme sur ceux de rencontre amicale ou festive.  On ne soulignera non plus jamais assez le rôle de cette jeunesse populaire qui s’engagera avec enthousiasme dans l’organisation semi-clandestine locale, en perspective de l’action, lorsque les menaces de coup d’État deviendront de plus en plus évidentes.  Pour autant, ce front « rouge » n’est pas un bloc homogène : il est, pour employer un langage contemporain, un « front de classes » (paysannerie de petits propriétaires, artisans, ouvriers agricoles et ouvriers de la petite industrie ou de l’arsenal, instituteurs, notaires, médecins…). Il présente donc dans les engagements des uns et des autres des nuances, des clivages, voire parfois des oppositions.  Mais ce qui les unit procède de deux données fondamentales. La première, nourrie des souvenirs de 1789 et de 1793, est l’espérance quasi messianique de la vraie République, la « Bona », la « Santa », la République du Peuple et non pas celle du « Parti de l’Ordre » au pouvoir, celle des « Gros » et des aristocrates. L’horizon de la victoire est celui des élections de 1852. Horizon de fraternité qui se concrétise déjà par la solidarité entre les « Frères et Amis » : par exemple, on travaille le champ du camarade malade. La seconde donnée, on ne le soulignera non plus jamais assez, est la ténacité avec laquelle les « Rouges » donnent un contenu très concret à leur propagande. L’espérance républicaine s’appuie sur un programme immédiatement réalisable de lutte contre l’usurier, d’organisation du crédit agricole, de défense de la petite propriété, de mutuellisme, de généralisation de l’instruction, de l’affirmation des libertés communales, etc. « Socialisme pratique » que les ouvriers bouchonniers de La Garde Freinet initient avec leur mouvement coopératif…  C’est ce faisceau de données qui explique la puissance de la résistance varoise au coup d’État de 1851 : le succès de Louis-Napoléon signait la fin de l’espérance de 1852.  On sait comment cette « insurrection légaliste », contre un Président qui violait la Constitution, fut écrasée par l’armée.  Des centaines d’insurgés varois trouvèrent refuge et hospitalité dans le Comté de Nice, où beaucoup se fixeront. Mais l’écrasement de décembre 1851 ne signifiait pas la fin du républicanisme varois. Il relèvera progressivement la tête, et, dès la chute de l’Empire, en 1871, les Varois n’envoient au Parlement que des députés républicains radicaux, cependant que le préfet provisoire, ancien leader de l’insurrection de 1851, témoignait de sa sympathie à l’égard de la Commune de Paris.

Son implantation sur le haut d’une colline vaut à Tourtour son appellation de « Village dans le ciel ». Le village s’est construit sur le passage des eaux de source ; la source principale s’appelle le Saint-Rosaire. Le village a vue imprenable sur tout le moyen Var jusqu’à la montagne Sainte-Victoire. La commune comporte deux hameaux : celui des Mandins et le « Domaine de Saint-Pierre de Tourtour ». Le plus important, Saint-Pierre de Tourtour, est un ensemble résidentiel intégré dans un site forestier avec un lac artificiel avec plan d’eau, 3 petits étangs, une piscine, des courts de tennis,… créé par Beaumont, inventeur des Issambres. La copropriété du domaine Saint-Pierre est située sur les territoires des communes de Tourtour, au sud, et d’Ampus, au nord. La présence du Néolithique est attestée à Tourtour par les nombreux vestiges découverts à Arquinaud (poteries, fonds de cabanes, outils). À l’âge du fer, cinq oppidums et un poste de vigie occupaient la vallée de Florieye. Non loin de la Via Julia Augusta – branchement de la Voie Aurélienne allant de Forum Julii (Fréjus) à Forum Reii (Riez) – les Romains construisirent de nombreux établissements de plaine au quartier Saint-Pierre, à l’Evoue, aux Treilles, au Colombier. Leur présence est attestée jusqu’au Ve siècle ap. J.-C., époque des invasions barbares. Après avoir arrêté les Arabes à Poitiers, Charles Martel aurait rencontré les Sarrasins en 739, dans la région de Tourtour. En 973, le comte Guillaume Ier de Provence y remporta une victoire sur les Sarrasins venant de leur base de Fraxinet à l’actuelle Garde Freinet. Grâce à l’appui de Bertrand II de Castellane, des Cisterciens de Mazan, dans le Vivarais, appelés par Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse et marquis de Provence, s’établissent le 14 avril 1136 au quartier de Florieille. Les restes de la Chapelle Notre-Dame de Florielle constituent les derniers vestiges de l’Abbaye de Florièye témoignant de la présence des moines cisterciens. Dix ans plus tard, ces moines se fixent au Thoronet. En 1235, Raimond Bérenger IV de Provence cède à de Blacas d’Aulps ses droits sur Tourtour et Fox-Amphoux contre la seigneurie de Séranon. La seigneurie passe ensuite aux Puget avant d’être partagée au xviie siècle entre cinq co-seigneurs dont les De La Tour, les Castellane, les Raphaelis et les Fabry. En 1638, Anne d’Autriche, se rendant en pèlerinage d’action de grâce à Cotignac, s’arrête à Tourtour. À cette occasion deux ormeaux sont plantés sur la place du village. À la suite du coup d’État du président Louis Napoléon Bonaparte, le 2 décembre 1851, la répression de l’insurrection varoise le 10 décembre 1851, à Tourtour et Aups, a été terrible. Comme le rappelle René Merle, les femmes qui s’étaient mobilisées n’ont pas été épargnées. En 1944, deux résistants du maquis du Haut Var sont exécutés par les Allemands. Tourtour est aussi une ville où se sont installés de nombreux artistes, dont Bernard Buffet, peintre français né le 10 juillet 1928 à Paris. Il s’est donné la mort le 4 octobre 1999 dans ce petit village qui présente deux sculptures de l’artiste représentant un scarabée et un papillon.

La bataille de Tourtour vit en 973 la victoire du comte Guillaume de Provence sur les Sarrasins: elle marque leur expulsion définitive de la Provence suite une présence entrecoupée de plus de deux siècles. Depuis plusieurs décennies, les Sarrasins s’étaient implantés en Provence grâce à des forteresses, d’où ils effectuaient de temps en temps des raids de pillage. Leur place forte la plus importante était le Fraxinet, à l’actuelle Garde-Freinet. Au début, les seigneurs provençaux restèrent passifs. Cependant, au début de l’année 973, les Sarrasins commirent une erreur. Né à Valensole, Maïeul, l’abbé de Cluny, était vénéré par les Provençaux. Les Sarrasins pensèrent qu’en l’enlevant, ils pourraient en obtenir une importante rançon. Ils réussirent à le capturer au pont du Châtelard (le Châtelard, Valais) près d’Orsières, en juillet 972. Depuis 921, des bandes sarrasines, provenant de Provence, s’étaient rendues maîtresses de nombreux passages d’importance dans les Alpes occidentales dont le col du Mont-Joux que le vénérable abbé venait de franchir avant d’être reconnu et pris. Refusant de laisser l’abbé de Cluny aux mains des Sarrasins, les moines de Provence réussirent à réunir la rançon demandée. Tenant parole, les Sarrasins libérèrent leur otage. Les moines se chargèrent alors de soulever chez les Provençaux une véritable furie guerrière contre les Sarrasins. Ils donnèrent à l’enlèvement de Maïeul de Cluny la plus grande publicité possible, réussissant à fédérer l’ensemble de la population autour du comte Guillaume, pour mener une offensive destinée à chasser définitivement les Sarrasins. Le comte Guillaume de Provence, appelé par la suite le Libérateur, répondit à l’appel de ses sujets et leva l’ost. De nombreux guerriers de Provence, mais aussi du Bas-Dauphiné et de Nice formèrent son armée. Guillaume décida d’attaquer les Sarrasins au Fraxinet même, au cœur de leur dispositif, avec toutes ses forces. Si son offensive réussissait, le reste des forces musulmanes de Provence, beaucoup moins fourni, n’aurait aucune chance de résister à une offensive menée par toute l’armée provençale. Renseignés sur les mouvements des Provençaux, les Sarrasins descendirent de Fraxinet pour engager le combat en rase campagne. Cinq premières batailles eurent lieu dans les Alpes provençales, à Embrun, Gap, Riez, Ampus et Cabasse. Battus dans tous ces affrontements par les Provençaux, les forces des Sarrasins se regroupèrent à Tourtour. Guillaume ne tarda pas à les rejoindre et y engagea la sixième et la plus importante bataille. Écrasés par les Provençaux, les Sarrasins regroupèrent leurs dernières forces, remontèrent à la Garde-Freinet et s’y retranchèrent solidement. Après avoir donné un peu de repos à ses troupes, Guillaume fit donner l’assaut au Fraxinet. Les guerriers provençaux des seigneurs de Levens, d’Aspremont, de Gilette, de Beuil et de la ville de Sospel furent désignés pour l’attaque (toutes ces villes se trouvent actuellement dans le département des Alpes-Maritimes). Après avoir atteint le sommet de la Garde-Freinet, les Provençaux attaquèrent les retranchements du Fraxinet, en chassèrent les Sarrasins, et enfin s’emparèrent entièrement de la forteresse. Les Sarrasins trouvèrent un dernier refuge dans une forêt voisine, mais, vivement poursuivis, furent vite neutralisés : Ils furent soit tués soit faits prisonniers. La forteresse de Fraxinet fut entièrement rasée, les Sarrasins survivants baptisés de force et réduits en esclavage. La plupart des dernières troupes musulmanes quittèrent la Provence sans attendre l’arrivée des troupes provençales. Par cette offensive décisive de 973 et des batailles qui suivirent, les Sarrasins sont définitivement expulsés de leurs bases fortifées. Si une partie importante de la communauté sarrasine a sans doute péri au cours des combats, il est clair que des groupes de survivants demeurèrent dans la région y faisant souche et que certains se convertirent à la religion chrétienne. Le temps et d’innombrables mélanges de populations firent les reste : lentement, au fil des générations, le contingent sarrasin se dissout ainsi dans la population provençale.

Lavoir à Tourtour

Lavoir à Tourtour (Photo : F. V., juillet 2012).

Les Celto-ligures établirent au sommet du promontoire rocheux un poste de vigie qui surveillait la route d’accès à l’oppidum de Saint-Lambert, situé à 5 km au nord-ouest. Après la destruction d’Antea par les Romains, de nombreuses familles s’établirent sur le territoire de Flayosc. A trois kilomètres du village, près de la chapelle Saint-Pierre de Lavarron, de nombreux vestiges gallo-romains ont été découverts (lampes, vases, monnaies, briques…) ainsi qu’une inscription funéraire de C.Julius (Musée de Draguignan). À Flayosc même, près de la porte dite de la « Reinesse », la chapelle du « Père Eternel » dont subsistent quelques vestiges dans une cave, fut construite sur l’emplacement d’un ancien temple christianisé avant le Ve siècle. D’après la légende le nom de « reinesse », viendrait de « rainette », petite grenouille qui était l’objet d’un culte païen. Les Sarrasins détruisirent le village qui, sous l’impulsion de ses seigneurs, les Villeneuve, se releva rapidement de ses ruines. Une puissante enceinte fortifiée entoura la nouvelle agglomération. Trois portes accédaient au village : la porte Dorée, la porte de Paris et la porte de la Reinesse. Au XIVe siècle, la reine Jeanne accorda aux habitants de nombreuses franchises parmi lesquelles le droit de capter les eaux de la Flaielle pour l’alimentation du village. En 1589, le marquis de Trans s’évada de prison et se réfugia à Flayosc. Informé de sa retraite, le duc de la Valette, gouverneur de Provence, envoya le soir de Noël quelques hommes, qui, par un soupirail, jetèrent dans la maison du marquis une « saucisse » de poudre. On retira seize corps des décombres et le marquis, blessé, retourna en prison. En 1678, la baronnie fut érigée en marquisat en faveur de François de Perier. Alexandre de Villeneuve, dernier marquis de Flayosc, se réfugia à Aix pendant la Révolution française. Le 3 mai 1792, à dix heures du soir, sous la conduite du maire, Jean-Joseph Bérard, des officiers municipaux et du juge de paix, Vincent Lombard (futur président du tribunal révolutionnaire du Var), les habitants munis de pics et de pioches, se rendirent au château. Ils enfoncèrent les portes, arrachèrent les grilles, les fenêtres et détruisirent les meubles, les livres de la bibliothèque et les archives seigneuriales. En une seule nuit, ils démolirent l’ancienne demeure féodale des Villeneuve. Cet acte fut condamné par les autorités locales, mais l’Assemblée législative à Paris les en félicita. Au XIXe siècle, Flayosc devint le grand centre de la chaussure. Les nombreux cordonniers qui y travaillaient étaient surnommés « lei pegot »: ceux qui manipulent la poix. Une fabrique de faïence et des briqueteries s’installèrent également à Flayosc. Grâce à cette activité économique, le village connut jusqu’au début du XXe siècle une période prospère. Plus de 3 000 habitants y étaient recensés en 1914.Le 8 décembre 1851, les résistants au coup d’État du 2 décembre 1851 sont arrêtés par le préfet Pastoureau.

Une drôle d’histoire hante Flayosc, celle de Mussolini. Les nuits sombres sont l’occasion de se remémorer certaines histoires à frémir, que l’on soit rationaliste ou… fan de fantômes. C’est Charly Clairici, grand connaisseur de l’histoire locale et membre de la Société d’Etudes Scientifiques et Archéologiques de Draguignan et du Var qui témoigna de faits étranges, vus et entendus du côté de Sauveclare, dans une étrange demeure à l’abandon, près de Flayosc. Chacun se fera, naturellement, son opinion. Au sud de Flayosc, on peut encore apercevoir une ruine au curieux destin. C’est en 1935 qu’un riche industriel italien y fit ériger une villa afin d’y séjourner pendant les vacances d’été. Accompagné de son épouse et de sa fille, ce richissime estivant, par ailleurs fervent partisan du régime fasciste italien, venait régulièrement passer l’été dans cette demeure. Les Lorguais de l’époque ne manquaient pas de remarquer cette famille qui faisait ses courses au village dans une luxueuse auto Fiat. C’est en 1937 qu’un drame se joua : lors d’un déplacement dans le département, la famille fut impliquée dans un accident de la route où l’unique fille perdit la vie, tandis que l’épouse y laissa une jambe. La demeure de Sauveclare perdit son charme. Son propriétaire cessa de s’en occuper et la façade de briques rouges ne fut jamais enduite, les quatre colonnes qui supportaient l’étage ne furent jamais crépies. Une légende surgit à peu près au même moment. On disait que Benito Mussolini lui-même aurait passé quelques week-ends avec sa maîtresse dans la maison de Sauveclare, prêtée par son ami industriel. Qu’en est-il vraiment ? On sait en tout cas qu’au mois de juillet 1938, un convoi de cinq grosses italiennes aux vitres teintées, traversa Flayosc en direction de Sauveclare. S’agissait-il du « Duce » venu en catimini et sous bonne escorte, revoir la maison tragique ? La Seconde Guerre mondiale déferla alors, avec son cortège de drames et la maison fut fermée pour de bon. Depuis les années 1970, les lieux sont souvent visités par des curieux ou des amoureux en quête d’un recoin discret, qui racontent à leur tour y avoir entendu des coups sourds émanant des caves et avoir déguerpi illico presto. Une équipe de cinq braves, amateurs d’étrange, s’organisa alors, mais leur expédition tourna court : d’étranges vibrations parcouraient les lieux. Les courageux prirent leurs jambes à leur cou en direction de Lorgues, sans demander leur reste. Personne n’eut plus le cran de se lancer dans l’exploration de la mystérieuse demeure. Hormis Charles Clairici et une bande d’amis qui décidèrent, en 1972, d’en avoir le coeur net. Charles livra le mot de la fin : « Sur les lieux, rien d’extraordinaire ne se produisit. Seul, un violent orage éclata. Un éclair foudroya un cyprès au seuil de la maison. Un fait de circonstance ? Mais par comble de l’horreur, en quittant cet endroit, le faisceau de ma lampe de poche se posa sur une prothèse de jambe abandonnée au milieu des décombres… » [Var-matin : samedi 2 janvier 2010].

En 1999, le tournage de l’adaptation cinématographique de l’oeuvre de Marcel Pagnol « Le Schpountz » réalisé Gérard Oury, fut réalisé à Flayosc. D’après l’oeuvre de Marcel Pagnol, le film relate l’histoire Irénée, qui travaille avec son cousin Casimir dans l’épicerie de son oncle, rêve de devenir une vedette du cinéma. L’occasion se présente quand, au cours d’une tournée avec leur camionnette-épicerie, ils rencontrent une équipe de repérages à la recherche d’un décor pour un film en préparation. Irénée qui connait la région comme sa poche leur propose de leur venir en aide. Tant et si bien qu’il s’incruste dans l’équipe de tournage et finit par devenir gênant. Pour se moquer de lui, l’équipe lui fait signer un faux contrat, lui proposant le rôle principal du film « Le Schpountz »

Le Schpountz (film, 1999) - affiche -

Le Schpountz (film, 1999) – affiche –

Ici s’achève le premier itinéraire à travers le haut pays dracénois. Initialement mon projet envisageait plusieurs itinéraires concernant la côte provençale, le centre var agricole…  De par ces collines, sentiers et villages, les invitations à relater l’histoire, anecdotes sont très nombreuses et mon entreprise fut peut être très ambitieux. Cependant, je fus heureux de de retranscrire ce petit témoignage de cette région par laquelle je suis passionnée. Je serais heureux de vous retranscrire d’autres itinéraires thématiques aux alentours de Draguignan.

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